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La Préface à la Renaissance : un discours sexué ?

François Rigolot

François Rigolot, "La Préface à la Renaissance : un discours sexué ?", dans Cahiers de l’Association internationale des études francaises, 1990, n° 1, p. 121-135.

Extrait de l’article

Depuis quelques années, des travaux critiques de plus en plus nombreux sont consacrés à la théorie des liminaires et, plus particulièrement, du discours préfaciel. Pour reprendre l’expression de Gérard Genette, la préface est « un des lieux privilégiés de la dimension paradigmatique de l’œuvre, c’est-à-dire de son action sur le lecteur ».

Diverses tentatives ont été menées pour répertorier les fonctions que joue le « discours préfaciel » dans la préparation et le conditionnement du public à la lecture de l’œuvre qu’il annonce. On s’accorde généralement à reconnaître que, dans la tradition rhétorique occidentale, la préface est un lieu de passage, un « vestibule initiatique » qui, tout en gardant son rôle ornemental et en sacrifiant aux contraintes souvent artificielles du « décorum », cherche à déjouer les censures pour annoncer la « vérité du texte ». L’aspect performatif du discours préfaciel est évident. L’émetteur du message liminaire, non content de déclarer, a tendance à prescrire ; et son dire devient le plus souvent un faire. De là le caractère généralement réducteur de toute préface lorsqu’elle assigne une intentionnalité politique ou morale à un texte littéraire dont l’essence est justement d’être ouvert à la pluralité des interprétations. On connaît le paradoxe : la préface est un mensonge sur l’œuvre qu’elle est censée préfacer. Praefatio mendax.

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