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Poème mondain ou œuvre morale ? 

Liliane Dulac

Liliane Dulac, « Poème mondain ou œuvre morale ? », dans Cahiers de recherches médiévales, 8, 2001, p. 209-224.

Extrait de l’article

Personne ne songerait à reconnaître dans Le Dit de Poissy une étape majeure dans la carrière littéraire de Christine de Pizan. Pourtant ce dit est loin d’être sans attraits, dans les parties descriptives notamment, dont la couleur, le rythme et le ton, plus personnels que d’ordinaire, débordent le cadre des conventions du genre. Cependant c’est surtout la construction surprenante, voire bizarre de ce poème qui le distingue et peut susciter l’intérêt : car cette particularité fournit l’occasion de proposer quelques réflexions qui permettront peut-être de mieux comprendre un moment important de l’évolution littéraire et morale de Christine.
Le Livre du Dit de Poissy, qui compte plus de 2 000 vers, est daté d’avril 1400. L’œuvre appartient donc à la première partie de la carrière de Christine de Pizan, consacrée à la poésie légère et amoureuse. Le sujet en est simple, apparemment du moins : s’adressant au dédicataire, un « bon chevalier vaillant » à qui elle a promis un de ses diz, Christine lui annonce qu’il lui sera demandé de se constituer en « juge » pour trancher le débat de deux amants. Cependant l’ensemble du poème se présente comme le récit d’une excursion de deux jours aux environs de Paris. La narratrice, Christine elle-même, se rend à Poissy par un beau matin de printemps, à cheval et accompagnée d’un groupe d’amis, des gens de la cour : elle va voir sa fille qui est religieuse dans la célèbre abbaye. Après un bref séjour à Poissy, la joyeuse compagnie repart pour Paris et pendant le retour Christine assiste au débat d’une dame et d’un écuyer, amants désespérés dont chacun se prétend le plus malheureux. Christine présente leurs récits et leurs arguments au dédicataire du poème qu’elle invite à juger le cas.

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