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Du couple et des couples à l’époque carolingienne

Janet L. Nelson

Janet Nelson, « Du couple et des couples à l’époque carolingienne », Médiévales 65, automne 2013, p. 19-31

Extrait de l’article

Les historiens – mais ils ne sont pas les seuls, car c’est le cas de la plupart des gens – considèrent a priori le couple comme une Bonne Chose, à l’instar de l’amour romantique : il constituerait un véritable marqueur de progrès dans la marche vers la civilisation. Or les hauts médiévistes d’aujourd’hui, particulièrement en France, ont affirmé que le couple avait été inventé à l’époque carolingienne. Et les Français et les chercheurs francophones en général ont par ailleurs tendance à privilégier les structures ; les Britanniques en revanche sont prudemment empiriques. Tout en saluant la complémentarité de ces approches, en tant que Britannique, j’aborderai naturellement les choses sous un angle empirique. Je traiterai donc en premier lieu de quelques points méthodologiques et chronologiques, avant d’envisager quelques cas particuliers.

Polyptyques, lois, sources liturgiques : une mutation documentaire

À partir du VIIIe siècle, l’accroissement quantitatif et qualitatif de la docu­mentation peut donner une impression de nouveauté dans ce que nous connaissons des couples. Aux VIe et VIIe siècles, ces informations viennent en effet de façon écrasante de sources normatives ou narratives, mais aussi de l’archéologie, alors que pour les VIIIe et IXe siècles, si les sources écrites de ce type subsistent, s’ajoutent à celles-ci les chartes, qui les submergent par leur nombre : quelque 4 500 actes sont conservés pour le seul règne de Charlemagne. Dans ces chartes, on voit intervenir essentiellement des laïques – souvent des couples – qui fondent des églises, leur font des donations, ou défendent leurs droits et font mettre par écrit ces actes afin de les conserver dans leurs archives. Cette mutation documentaire n’est pas une coïncidence mais, comme c’est le cas pour d’autres mutations du même genre, l’impression de nouveauté peut être trompeuse du fait que les éléments que nous comparons ne sont pas comparables.

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