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Aliments symboliques et symbolique de la table dans les romans arthuriens (XIIe-XIIIe siècles)

Anita Guerreau-Jalabert

Guerreau-Jalabert, Anita, "Aliments symboliques et symbolique de la table dans les romans arthuriens (XIIe-XIIIe siècles)", dans Annales, année 1992, volume 47, numéro 3, p. 561 - 594.

Extrait de l’article

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Ces quelques exemples, choisis parmi bien d’autres, sont tout à fait représentatifs de ce que l’on peut attendre d’une enquête sur les thèmes de l’alimentation et de la commensalité dans la littérature arthurienne : des notations en quantité variable suivant les auteurs, au total assez fréquentes, mais redondantes et en définitive d’une grande imprécision tant sur la nature exacte des mets consommés que sur leur préparation et sur le service de table.

L’examen attentif de cet ensemble de mentions montre que ce qui intéressait les auteurs, c’était bien moins les descriptions détaillées, originales ou pittoresques que l’indication même d’un repas ou d’un type d’aliments. Sur ce point comme sur les autres, il est donc inutile de rechercher quelque « réalisme » que ce soit dans cette littérature dont les thèmes narratifs relèvent toujours d’un codage symbolique qui en limite singulièrement la diversité et la fidélité au réel : toute référence aux données matérielles, aux pratiques effectives n’y est représentée que par un petit nombre de notations similaires, qui relèvent de la convention de langage.

Un processus identique de stylisation caractérise par exemple la description du paysage, réduit aux quelques éléments opposés et complémentaires que sont la forêt, la lande, la montagne, la plaine, la mer, l’espace cultivé et l’espace habité. Et même si cela n’apparaît pas aussi clairement de prime abord, l’alimentation et la convivialité arthuriennes sont tout aussi imaginaires que les armoiries des héros de la Table Ronde et aussi peu réalistes que des tournois dont les femmes sont les organisatrices et les prix. Une fois encore, ce que donne à voir — et à interpréter — cette littérature, ce sont les composantes symboliques d’un système de représentation du monde et de la société propre au Moyen Age occidental et présenté, ici, dans sa version aristocratique et chevaleresque.

L’analyse de ces significations symboliques portera sur trois points principaux : la classification des types de nourriture et l’organisation du champ des aliments, les valeurs attribuées au don et au partage des aliments, enfin le cas particulier, mais aussi particulièrement lourd de sens, de la Table Ronde.

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