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Causa natalium ad forum ecclesiasticum spectat :un pouvoir redoutable et redouté

Anne Lefebvre-Teillard

Anne Lefebvre-Teillard, "Causa natalium ad forum ecclesiasticum spectat :un pouvoir redoutable et redouté", dans Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes, année 2000, numéro 7.

Extrait de l’article

Causa natalium... ad forum ecclesiasticum spectat. Lorsqu’en 1223 le pape Honorius III, écrivant au roi de France, affirme ainsi la compétence de l’Église, personne n’en doute plus, à commencer par Louis VIII lui-même. Il lui suffisait de se remémorer, en la matière, l’édifiant exemple de son père. En ce début du XIIIe siècle, c’est à l’Église qu’il appartient en effet de dire qui est légitime ou qui ne l’est pas. Pouvoir redoutable car de la qualité de légitime dépend celle d’héritier... pouvoir redouté pour cette raison même. C’est pourquoi tout en étant reconnu, il va être au cœur de vives controverses, voire, comme en Angleterre, d’affrontements entre les deux pouvoirs. L’enjeu était trop important pour un pouvoir temporel reposant essentiellement sur une transmission héréditaire, pour qu’il ne cherche pas, par différents moyens, à limiter, voire à éliminer la compétence de l’Église en cette matière. Une compétence que nous examinerons avant de voir quels furent les moyens mis en œuvre à son encontre.

La compétence de l’Église en matière de filiation légitime est étroitement liée à sa compétence devenue exclusive en matière de mariage : juger de l’existence ou de la validité d’un mariage dépend de l’Église et d’elle seule. Or comme le montrent les décrétales d’Alexandre III (1159-1181) et d’Innocent III (1198-1216) réunies sous le titre Qui filii sint legitimi dans le recueil officiel des Décrétales de Grégoire IX (1234), la plupart, pour ne pas dire la quasi totalité, des contestations en légitimité sont fondées, à cette époque, sur l’inexistence ou l’invalidité du mariage des parents3. C’est donc par voie de conséquence que l’Église a été amenée à juger de la légitimité d’une personne. Elle le fait généralement de manière préjudicielle, c’est-à-dire avant toute décision sur le fond du procès, dans le cadre d’affaires successorales qui sont, elles, portées devant le juge séculier. Mais ses tribunaux peuvent aussi être directement saisis, à titre principal, de la question.

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