Un exercice scolaire et épistolaire : les lettres latines de Marie Stuart, 1554
Sylvène Edouard
Comment citer cette publication :
Sylvène Edouard, Un exercice scolaire et épistolaire : les lettres latines de Marie Stuart, 1554, Paris, Cour de France.fr, 2013. Article inédit mis en ligne le 1er janvier 2013 (https://cour-de-france.fr/article2597.html)
En juillet 1554, et sous la direction de son maître d’école Claude Millet (ou Millot selon les états de maison), Marie Stuart commença la rédaction d’une série de lettres familières très courtes, conservées dans un cahier qui présente, sur chaque page de droite, la lettre latine écrite par la petite reine d’Écosse et, sur la page de gauche, le même texte, mais en français, de la main du maître [1]. Essentiellement adressées à Élisabeth de Valois, la fille aînée de Henri II et de Catherine de Médicis, ainsi qu’à d’autres membres de la cour comme Claude de France et le dauphin François, ces soixante-quatre missives sont en réalité un exercice scolaire qui dura près de six mois. Le maître a alors vraisemblablement donné à la jeune reine un sujet à traiter sous forme épistolaire : « Acquérir de la doctrine ». La visée pédagogique de l’exercice est multiple. Celui-ci consiste à la fois à argumenter la nécessité d’apprendre les bonnes lettres, à parfaire sa maîtrise du latin, et enfin à composer des lettres familières. Cet exercice est donc étroitement lié aux éditions à usage scolaire de la première moitié du XVIe siècle. Or, pour leurs études, Marie et les Enfants de France disposaient sans doute de leur propre malle de livres qui les suivait lors des déplacements de la cour, et d’une bibliothèque au troisième étage du château de Saint-Germain-en-Laye où se trouvaient également leurs appartements.
La question des exercices scolaires princiers a été peu traitée du point de vue des livres à usage scolaire et cette pauvreté historiographique tient avant tout à la rareté des sources. En dépit des nombreuses Institutions, des plans d’études et des dédicaces, il existe peu d’inventaires des livres dédiés à l’éducation des princes et le plus souvent aucune trace des achats de livres. On dispose d’une bonne documentation concernant les livres à usage scolaire d’Édouard VI et de Philippe II d’Espagne [2], mais, dans le cas de Marie Stuart, cette documentation fait défaut, à l’exception d’un état des dépenses pour les années 1550-1551 qui ne fait aucune allusion à des achats de livres, de même qu’il n’existe aucun inventaire de ses livres d’études [3]. Seules ses lettres permettent de reconstituer en partie sa petite librairie. Quant à la conservation de ce recueil de missives, le cas est exceptionnel mais loin d’être unique et comparable aux centaines de feuillets noircis par Édouard VI dans le cadre de ses propres exercices scolaires entre 1545 et 1553.
En dépit de la brièveté des lettres de Marie Stuart et de leur petit nombre, leur examen permet de mieux cerner les conditions de l’apprentissage princier. Les livres à usage scolaire ont ainsi pu être identifiés tandis que le rôle de la petite reine d’Écosse dans l’invention de ces lettres reste à définir. Le croisement entre les sources et les lettres autorise cependant quelques hypothèses sur la conduite de cet exercice de rhétorique latine par une élève de onze ans à la cour de France. Ce recueil, qui méritait bien une analyse approfondie, éclaire non seulement la question des livres d’études mis à la disposition des princes dans la première moitié du XVIe siècle – question jusqu’alors peu traitée [4] - mais aussi celle de la pratique scolaire à travers l’usage des livres [5]. Pour répondre à ces questions sur l’exercice ayant conduit Marie Stuart à rédiger et/ou traduire en latin soixante-quatre lettres entre juillet 1554 et janvier 1555, cette étude entend suivre le déroulement chronologique de ce recueil qui peut être divisé en trois moments
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distincts. Dans un premier temps, de la lettre 1 à 25, les références retenues par Marie semblent mêler l’enseignement oral du maître et les lectures sans doute recommandées par lui, de même que certaines lettres pourraient être des thèmes, c’est-à-dire des traductions en latin du texte proposé par le maître d’école. Dans un second temps, Marie poursuit seule l’écriture et consacre quinze lettres sur le sujet des femmes savantes. Enfin, dans un troisième temps, de la lettre 41 à 64, elle reprend l’exercice de rhétorique sur la nécessité d’instruire le prince. Chacun des trois temps de composition est lié à des ouvrages et des usages spécifiques.
« Quod virtus venit de studio bonarum literarum »
Bénéficiant de nombreuses éditions latines consacrées à l’instruction, Marie Stuart et son maître d’école traitèrent de la nécessité d’instruire le prince à partir d’un certain nombre d’ouvrages identifiables. En 1554, les livres à usage scolaire étaient essentiellement en latin même si les éditions vernaculaires se multiplièrent dès les années 1520, mais, concernant ceux utilisés par Marie Stuart, les traductions furent toutes postérieures à la rédaction des lettres [6]. Elle n’eut d’autre choix que de consulter des éditions latines. En revanche, le seul livre français utilisé par Marie est une Institution : le Manuel royal de Jean Brèche, dédié à Jeanne d’Albret en 1541. Si ces livres sont parfaitement repérables au cours de l’exercice, fournissant tous les arguments nécessaires à son discours, il est possible qu’elle ait eu recours également à des manuels pour la pratique de la rhétorique ou encore pour apprendre l’art épistolaire. Marie a pu utiliser les ouvrages de méthode d’Érasme (le De conscribendis et le De duplici copia verborum ac rerum), ou encore ceux des rhéteurs français comme Pierre Fabri et Omer Talon, de même qu’elle a pu bénéficier, à la cour, de l’influence d’Antoine Fouquelin [7]. Concernant le contenu des lettres, ces dernières puisent dans des éditions fournissant une synthèse de la pensée classique à travers des apologues, des sentences, des apophtegmes et des symboles qu’il était fréquent de réunir dans des recueils comme le firent Érasme ou encore Juan Luis Vivés.
De juillet à septembre 1554, de la lettre 1 à 25, Marie Stuart suit alors les déplacements de la cour, du palais archiépiscopal de Reims au château de Compiègne, et semble avoir emporté avec elle quelques livres. Or, dans le cadre de la leçon donnée par le maître sur le sujet de la doctrine du prince, le premier qu’elle ouvre pour y recopier la substance de ses lettres se trouve être le De ratione studii de Juan Luis Vivés [8]. Cet humaniste valencien était d’abord entré au service de l’ancien gouverneur de Charles Ier d’Espagne pour servir de précepteur à son fils Guillaume de Croÿ. Puis en 1521, après la disparition de ce protecteur, et grâce à son De Institutione feminæ christianæ [9] dédié à la reine d’Angleterre Catherine d’Aragon, il s’attira les faveurs de Henri VIII et du cardinal Wolsey lors de leur passage à Bruges. En 1523, il dédia la première partie de son De ratione studii à Charles Mountjoye, fils du fameux Lord Mountjoye qui était très lié au milieu humaniste et universitaire anglais, et la seconde partie à Marie Tudor, fille de Henri VIII. Le roi d’Angleterre lui en sut gré en le nommant professeur à Oxford et directeur des études de la princesse. Dans le cadre de cette nouvelle fonction, l’humaniste proposa, avec le De ratione studii , un plan d’études et non un recueil de sentences ou de maximes dont le genre, à savoir gnomique, était très à la mode. Les informations programmatiques concernant les lectures de la princesse révèlent alors un recours assez limité aux livres. La sélection de ces derniers répondait aux exigences d’une éducation chrétienne, servant plus à l’édification des vertus de la princesse qu’à celle de son savoir. De fait, Vivés déconseillait la poésie gréco-latine jugée trop licencieuse, comme les Métamorphoses d’Ovide, ainsi que les lectures peu sérieuses comme les historiettes et les romans de chevalerie. Au chapitre des lectures, apparaissent plutôt des ouvrages scolaires tels que les Distiques du Pseudo-Caton, les Dits des Sept Sages qu’évidemment
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Érasme a édités et commentés [10]. Pour divertir, Vivés proposait aussi la lecture de fables et de quelques histoires édifiantes, ainsi que le traité de Valère sur la guerre qui enseigne surtout ce qu’est la vraie noblesse. En revanche il préconisait, pour la culture oratoire, le recours à : Cicéron, Sénèque, Plutarque, les dialogues de Platon, les épîtres de saint Jérôme, l’Institution du prince chrétien d’Érasme, son Enchiridion, ses Paraphrases et l’Utopie de Thomas More. Plus intéressant est son programme de poètes puisque celui-ci se limitait aux seuls poètes chrétiens tels que Sidoine et Prudence. Il lui concéda cependant la lecture de quelques historiens tels que Valère Maxime, l’historien romain Justin ou encore Florus. Finalement, Marie Tudor pouvait s’adonner quotidiennement à la lecture des poètes chrétiens de l’Antiquité, aux Épîtres et au Nouveau Testament. Il n’était donc pas question d’en faire une personne savante mais qu’elle fût seulement habile à la conversation en ayant appris à maîtriser la langue, non pas à partir de précieux grammairiens comme pour les garçons, mais seulement en puisant dans de simples recueils comme le De ratione ou encore le Satellitium dédié à la princesse anglaise en 1524. Le programme d’études pour le jeune Charles Mountjoye était autrement plus varié et Vivés opposait ainsi deux visions de l’apprentissage déterminées par le sexe.
Les autres plans d’études contemporains ne font pas, en revanche, une telle distinction, y compris celui de Sir Thomas Elyot en 1531 qui s’adresse à tous les futurs gouvernants [11]. Son programme commençait avec des lectures d’un abord facile comme les fables et les sentences puis s’enrichissait d’histoires comme celles d’Homère et de Virgile, et enfin de poésies. L’adolescent ne se consacrait à l’art oratoire que plus tard en se nourrissant de philosophie morale. L’âge est ainsi déterminant pour fixer l’ordre des lectures et doit être pris en compte pour apprécier celles des princesses. Marie Tudor n’a que sept ans lorsque Vivés lui dédicace son recueil de sentences et Marie Stuart en a onze lorsque cet ouvrage intègre sa leçon. Entre sept et onze ans, les lectures sont à peu près les mêmes, seuls changent les exercices et l’usage qui est fait de ces textes. Or, les lettres latines de Marie confirment ce recours limité aux livres puisque les deux premiers ouvrages qu’elle utilise, et qui font d’ailleurs partie d’une même édition, sont le De ratione studii et le Satellitium de Juan Luis Vivés, lesquels se succèdent dans cet ordre dans l’édition bâloise de 1539.
Les deux premières lettres tirent leur argument du De ratione studii afin de remontrer à la jeune destinataire Élisabeth que toute instruction prend son commencement de Dieu et dépend uniquement du travail : « car, ma mie, les ancians ont dit que les Dieus ne donnent leurs biens aus oisifs, mais les vendent par les labeurs » / « Nam, amica summa mea et soror, antiqui dixerunt Deos non dare bona sua otiosis, sed ea vendere laboribus » [12]. Le texte en français, qui est de la main du maître d’école, est assez éloigné de la version de Vivés mais les arguments sont bien les mêmes [13]. La partie latine rédigée par Marie suit fidèlement le texte français, comme s’il s’agissait d’un thème latin, mais il est difficile de déterminer lequel des deux est traduit par l’autre. La réponse se trouve sans doute dans la deuxième lettre qui a recours à une autre sentence tirée du recueil d’Érasme et qui fut traduite par Charles Fontaine en 1557 et intégrée dans son recueil des Dicts des sept sages, à savoir que « les dieux nous vendent tout par moyen de noz labeurs » [14]. Le traitement des arguments tirés de Vivés implique que le rédacteur de la lettre a déjà mis en place – dans le cadre de la dispositio - un certain nombre de lieux communs, tous tirés d’une même édition, puis résumés et paraphrasés, pour faire de l’instruction un commandement divin qui implique un dur labeur pour donner de la vertu au prince. Ce dernier point est formulé dans la troisième lettre dont l’argument est cette fois tiré du Satellitium et, cela, jusqu’à la lettre 10.
Marie Stuart a sans doute lu l’ensemble des maximes de Vivés pour pouvoir argumenter le sujet du savoir du prince. Il en ressort un discours sur plusieurs lettres, tirant ça et là ses commentaires. Or, le traitement
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de certaines lettres, révélant une paraphrase habile, joint aux maladresses syntaxiques de Marie Stuart pourrait soutenir l’hypothèse du thème latin [15]. Cela est d’autant plus probable que l’exercice du thème était fortement recommandé dans les écoles au moins une fois par semaine d’après les programmes d’études. Mais que faire alors de ces autres lettres qui ne font plus de la paraphrase mais recopient en partie le texte de Vivés ? Marie Stuart les a logiquement composées elle-même en recopiant en partie la source latine mais, sans doute aussi, avec l’aide de son maître qui aurait pu lui donner à traduire les deux premières missives. La part d’imitation et de commentaire personnel laisse entrevoir le cadre d’une leçon qui consisterait en la notation d’arguments tirés de Vivés et des discussions avec le maître. Mais de la prise de note à l’écriture, la jeune reine s’est appropriée cette connaissance en fonction des attentes liées à sa dignité, ce qui l’amène à produire un discours cohérent au cours de ces vingt-cinq premières lettres [16]. Sous la direction du maître qui donna une première piste de travail, la composition des missives est le fruit, semble-t-il, d’un vrai travail d’inventio développant son sujet à partir des exemples donnés par Vivés. Ces derniers lui forgent une culture des tropes, comme c’est le cas avec cette allusion à l’emblème du sceptre surmonté d’un œil – présent dans l’édition de Barthélémy Aneau en 1552 -, mais, surtout, nourrissent sa culture générale des lieux communs fondés sur les exempla. Ainsi, pour démontrer à Élisabeth qu’il faut exercer l’esprit à l’instruction tous les jours, elle cite l’exemple d’Apelle et imite Vivés : « A l’exemple d’Appelles peintre, qui en son art a este de si grande diligence, qui ne laissoit passer un seul jour, au quel de son pinceau ne tirast quelque ligne » / « Exemplo Appellis pictoris qui tanta fuit in arte sua diligentia ut nullus præteriret dies in quo non ipse lineam aliquam penicillo duxisset » [17]. Si cette partie de la lettre reprend littéralement Vivés, en revanche, le début est plus personnel et s’inspire d’un lieu commun des Institutions tiré de Plutarque et des recueils de sentences : « Puis doncques qu’un prince doit surmonter ses subiects non en voluptés, et délices, mais en sens, en tempérance et en prudence : et que son devoir et office est de préposer les utilités de la République aux siennes, il faut, ma seur, que mettions peine d’estre bien sages » / « Quum igitur princeps debet antecellere privatis non voluptatibus delicijsue : sed sensu temperantia et prudentia : et suum officiium anteponere utilitates Reip. suis : opus est (soror omnium charissima) nos dare operam ut sapiamus ». La lettre 8 est assez identique - en comptant cette fois sur une « parole mémorable » de Caton - tout en s’affranchissant encore de Vivés par le recours à un exemple tiré de Cicéron que Marie n’a pas nécessairement puisé dans un autre ouvrage car elle n’aurait pas eu recours, à son âge, au livre cité, à savoir les Orateurs illustres. Il est possible toutefois, que dans ce cas, le maître soit intervenu pour lui fournir cette référence.
Au cours de cette première phase de l’exercice, facilitée par le recours à un seul ouvrage et l’aide du maître, Marie Stuart croise une fable d’Ésope, rarement reprise dans les recueils ésopiques mais que Vivés inscrit dans l’une de ses sentences. La fable en question est celle des deux besaces dont la jeune reine apprécie tant le genre qu’elle se munit d’un recueil pour y lire la fable de la cigale et de la fourmi. Le genre de l’apologue était alors un outil pédagogique privilégié pour former l’esprit à l’allégorie et à la parabole. En joignant l’agrément d’un historiette divertissante à la portée morale de leur discours, les fables étaient appréciées des humanistes qui les insérèrent ici et là dans leurs recueils, comme Vivés dans le Satellitium ou encore Érasme dans ses Adages. Les éditions d’Ésope ayant été ainsi très nombreuses, il est difficile de préciser laquelle fut consultée par Marie, en latin ou en français. La première traduction française fut celle de l’augustin Julien Macho, dans une édition lyonnaise de 1480. Puis en 1547, une traduction anonyme reprit un grand classique éditoriale : l’édition scolaire de Martin Dorp, appelé l’Aesopus Dorpii de Louvain (1513), lequel connut près de cent cinquante rééditions jusqu’au milieu du XVIIe siècle [18]. Marie Stuart
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consulta sans doute cet ouvrage ou une édition française encore antérieure comme celle établie par Gilles Corrozet en 1542 et spécialement dédicacée au dauphin Henri. Cependant, partant du principe qu’elle avait surtout recours à des éditions latines pour des raisons purement scolaires, il est possible aussi de regarder du côté des éditions très contemporaines des lettres, comme celle de Sébastien Gryphe à Lyon vers 1550 ou encore celle de Jean Froben à Bâle en 1551. Cette dernière se présentait dans un petit format in-octavo qui la rendait plus maniable par de jeunes élèves et plus facilement transportable dans une malle.
Après avoir mis de côté Vivés pour le reste de la leçon, la petite reine d’Écosse semble avoir poursuivi son argumentation en s’aidant des Œuvres morales de Plutarque : « Cest pour vous inciter a lire Plutarque, ma mie, et ma bonne seur, que si souvent en mes epitres je fai mension de lui. Car cest un philosophe digne de la lecon d’un prince » / « Quum tam saepe facio mentionem Plutarchi amica summa mea et soror in meis epistolis hoc facio ut ad hunc legendum te incitem » (lettre 13 du 9 août). Il existait alors de nombreuses éditions des œuvres de Plutarque et pour la plupart très incomplètes avant le milieu du siècle. Alde Manuce avait édité un recueil grec de quatre-vingt-douze traités moraux en 1509, puis ce fut Froben à Bâle en 1541 qui renouvela l’édition grecque. Un autre éditeur de Bâle, Andreas Cratander, édita en 1530 un volume in-folio de plusieurs interprètes des œuvres morales de Plutarque, que l’éditeur lyonnais Sébastien Gryphe reprit dans le même ordre en 1542, dans deux volumes in-octavo de plus de cinq cents pages chacun [19]. Cette édition latine reprend d’ailleurs les œuvres morales traduites par Érasme : Des moyens de distinguer le flatteur de l’ami ; Comment on peut tirer profit de ses ennemis ; Règles et préceptes de santé ; Qu’il est requis qu’un prince soit savant ; Que le philosophe converse avec le prince ; Quelles passions sont les plus graves, celles de l’âme ou celles du corps ; Si ce mot commun est bien dit, cache ta vie ; De l’amour des richesses ; Des moyens de réprimer la colère et De la curiosité. Érasme dédicaça son Quo pacto possis adulatorem ab amico dignoscere au roi d’Angleterre Henri VIII, ayant lui-même procédé à une édition partielle de huit traités en 1514. Celui que la reine utilisa – « Que la vertu se peut enseigner » par Luscinius - n’y figure pas, ce qui renforce l’idée qu’elle ait eu recours à une compilation, comme celle de Cratander ou de Gryphe.
Dans la mesure où la cour se déplaçait fréquemment et que la reine transportait avec elle quelques ouvrages dans sa malle, le petit format de l’édition lyonnaise semble davantage convenir aux impératifs de cette vie nomade. Les deux volumes présentent également d’autres avantages comme l’épaisseur moyenne qui les rend plus maniables, la présence d’un index de noms et des marges permettant d’annoter le texte. Ce fut donc sans doute dans cette édition (celle de 1542 ou celle de 1549) que Marie Stuart prit connaissance des traductions latines de Plutarque par Luscinius. Même si cette hypothèse est la plus probable, il est aussi possible d’envisager qu’elle ait eu accès aux manuscrits de Jacques Amyot qui servirent à établir sa traduction des Œuvres morales publiées en 1572 seulement. En effet, en 1554, Jacques Amyot devait encore se trouver à la cour et partager l’univers des enfants puisque l’année précédente il avait dû remplacer brièvement le précepteur Danès auprès du dauphin François et de son frère Charles, duc d’Orléans. La présence de Jacques Amyot à la petite cour des Enfants a sans doute largement contribué à la notoriété du moraliste grec qu’il tenait pour le meilleur philosophe à soumettre aux jeunes princes, ainsi qu’il l’écrivit lui-même dans son épître dédicatoire à Charles IX en 1572 : « Et pour ce qu’il me sembla qu’apres les Saintes Lettres la plus belle & la plus digne lecture que lon sçauroit présenter a un jeune Prince, estoient les vies de Plutarque, ie me mis à revoir ce que i’en avois commancé à traduire en nostre langue […] » [20]. Érasme ne s’y était pas trompé non plus en s’inspirant de nombreuses fois du De liberis educandis du Pseudo-Plutarque, duquel il avait repris le principe ternaire sur lequel
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s’appuyait la pédagogie humaniste, à savoir la nature (dispositions naturelles), la raison (instruction) et l’exercice (habitus) [21].
Puis, après avoir laissé Vivés et le Plutarchi Chaeronei, Marie se plonge dans le Manuel royal de Jean Brèche, un Miroir des princes adressé en 1541 à la Jeanne d’Albret, princesse de Navarre et cousine du futur Henri II [22]. À partir du mois d’août, et donc seulement après deux semaines d’écriture, la méthode de travail change encore et relèverait alors plus de la synthèse personnelle à partir de plusieurs ouvrages. Le Manuel royal, bien qu’en français, semble avoir guidé quelque peu la réflexion de Marie Stuart. Son auteur, Jean Brèche, était un jeune écrivain d’une vingtaine d’années au moment de la publication du manuel, exerçant la profession d’avocat à Tours. Le Manuel fut son premier ouvrage et il en rédigea bien d’autres, comme des traités de droit ou encore des traductions d’auteurs latins et grecs [23]. Le Manuel est une Institution classique qui a le mérite d’afficher très clairement sa source qui n’est autre que Plutarque. Cette édition comprend d’ailleurs le Manuel Royal de Plutarque – plus connu par « Que le prince doit être savant » -, ainsi qu’un traité de la main même de Brèche intitulé Brief Traicté de la Doctrine et condition du Prince, dédié à la nièce de François Ier, Jeanne d’Albret – et enfin une traduction d’un miroir très ancien et fondateur de la culture moderne du genre : les sentences d’Isocrate. Il faut ajouter à ce moment de la leçon, l’utilisation par la reine d’un autre miroir très important à l’époque : l’Institution du prince chrétien d’Érasme. Ces deux traités sont très semblables en insistant sur la vertu de justice du prince, au cœur de leur réflexion, mais aussi en posant d’emblée la question de la nécessaire sagesse de ce dernier avant de s’interroger sur sa condition. Ayant recours à divers exempla, ils offrent de bons modèles à Marie Stuart pour poursuivre son argumentation sur le sujet de l’instruction, seule capable de rendre le prince sage en lui enseignant les vertus, entendues comme étant des vertus intellectuelles au sens aristotélicien : « Plutarque auteur digne de foi, a dit que les vertus s’apprennent par preceptes aussi bien que les arts » / « Plutarchus autor locuples ait virtutes discendas esse praeceptis ut aliae artes, et utitur illo argumento » (lettre 11). Suivant son Manuel, Marie Stuart en vient à la question cruciale du précepteur, longuement évoquée par Érasme dans son Institution de 1516 mais aussi dans son De ratione studii en 1512. Partisans de la douceur et de l’affection du maître, les humanistes pédagogues avaient fortement condamné les sévisses corporelles et les précepteurs plus préoccupés de flatter leur prince que de l’admonester. De plus, l’instruction relève de la responsabilité des parents qui doivent ainsi fournir un bon maître, au risque, dans le cas contraire, selon la « similitude » de Plutarque reprise par Brèche et Érasme, de rendre le prince aussi nuisible qu’un poison versé dans la fontaine publique :
Pource que la vraie amitie de laquelle ne vous aime plus que moimesme, me commande que tout le bien qu’aurai jamais sera commun entre nous, ma seur, je vous veuil bien faire participante d’une belle similitude que je leu hier en Plutarque.
Tout ainsi, dit il, que qui empoisonne une fontaine publique de laquelle chacun boit, n’est digne d’un seul supplice : Ainsi est tres malheureus et mechant qui gaste l’esprit d’un prince, et qui ne lui corrige ses mauvaises opinions, qui redonderont a la perte de tant de peuple [24]. Par quoi, ma seur, il nous faut ouir, et obeir a ceus qui nous remontrent. De Compieme 8 d’Aoust [25].
Cette question du maître était récurrente dans les Institutions pour souligner l’importance d’instruire le prince en vertus. Celles-ci arment ce dernier, selon Marie, contre la Fortune et fondent sa vraie noblesse. L’analyse des lettres latines permet ainsi d’affirmer que les jeunes princes avaient recours aux Institutions pour leur instruction alors qu’il est courant de considérer le contraire. Certes les miroirs étaient adressés le plus souvent à des rois avec l’idée sans doute de leur servir de guide mais ils étaient aussi le moyen pour les
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auteurs de briguer le rôle de précepteur et les miroirs, conservés dans les bibliothèques royales, devenaient à leur tour un support pédagogique pour l’instruction du prince. Le traité de Brèche ne pouvait être qu’utile à Marie puisqu’il répondait à la question posée par le maître, tout en apportant par son érudition une multitude d’anecdotes et de lieux communs tirés de la culture antique, comme le symbole pythagoricien du Y signifiant le chemin se séparant entre vice et vertu. Marie, grâce à Brèche, put développer, avec illustrations, les vertus du prince et les dangers de la tyrannie.
Les deux Institutions occupèrent la reine presque jusqu’à la fin de cette première rédaction, le 8 septembre 1554. Toutefois, elle se mit également à la lecture des colloques d’Érasme qui avaient l’avantage d’apporter des modèles de conversations latines aux jeunes enfants tout en leur prodiguant un enseignement moral. Aussi, un dimanche, alors que la reine l’attend dans sa chambre pour y grossir sa troupe de dames, elle s’attarde à la lecture du Diliculum ou Point du jour qui dénonce l’oisiveté [26] – sans doute sur les conseils de son maître -, puis elle passe à l’Épicurien et enfin à Magdalie qu’elle résume pour en énoncer brièvement la portée morale [27]. Tout en se plongeant dans l’une des nombreuses éditions des colloques, elle revient à Plutarque ou encore à Brèche et continue à démontrer à ses destinataires – Élisabeth et sa petite sœur Claude essentiellement - que le prince doit être instruit, travailler durement à devenir vertueux, éviter d’être un tyran, et tout cela dans une succession de plus en plus anarchique de références. Tandis qu’elle diversifie ses lectures, allant jusqu’à consulter le traité de Cicéron sur la vieillesse ou encore un recueil de ses sentences [28], la leçon semble s’épuiser d’elle-même et la petite reine est moins consciencieuse, prêtant moins d’attention à son exercice, au point que la dernière lettre ne s’appuie sur aucune référence particulière mais, dans le genre de l’admonestation, exhorte tout simplement Élisabeth à être plus studieuse.
L’exercice aurait sans doute pu s’arrêter là après deux mois de classe de rhétorique, d’autant que l’effort fourni par Marie Stuart est fort louable. En effet, un élève de son âge s’adonnait surtout aux thèmes latins pour approfondir la maîtrise de la grammaire et aux lectures de textes latins pour se forger également une culture de l’argument grâce aux fables, aux poésies, à la mythologie, aux histoires – profanes et saintes – ainsi qu’aux psaumes. Marie Stuart possédait donc déjà une culture suffisante à l’âge de onze pour être en mesure d’écrire quelques lettres familières dans le genre de la parénèse et donc de l’exhortation à la vertu, mais ce travail de rhétorique avait été toutefois simplifié par l’encadrement du maître et le choix d’ouvrages à sa portée.
Marie et la querelle des femmes savantes
À partir de la vingt-sixième lettre, Marie Stuart semble en avoir fini avec le sujet de la « doctrine du prince » et se lance dans le débat sur l’instruction des femmes. Le colloque d’Érasme sur Magdalie – L’abbé et la savante – avait sans doute commencé à éveiller sa curiosité et ce fut à l’occasion d’un incident survenu entre les Enfants qu’elle se lança dans l’arène. Garçons et filles avaient alors l’habitude de partager ensemble certains moments récréatifs, des jeux sans doute comme ceux reproduisant des aventures tirées des romans de chevalerie et, le plus souvent, ils assistaient ensemble aux fêtes ponctuées de bals et de combats fictifs. À l’occasion de l’une de ces rencontres, les garçons auraient tenu des propos dévalorisants au sujet des femmes. Marie prend visiblement très mal cette attaque qui vise leur instruction et leur savoir, elle-même passant certainement auprès des autres pour une jeune savante, étant plus âgée et donc plus avancée dans ses études que les filles du roi. Elle décide alors de démontrer, entre autres à la jeune Élisabeth, que plusieurs femmes de renom ont été en leur temps fort savantes afin de « répondre à ces beaux deviseurs, qui disoient hier que c’est affaire aux femmes à ne rien scavoir » [29].
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Le propos de la jeune reine est très simple et consiste à accumuler des exemples de femmes savantes. Il devient alors très facile de retrouver le livre source puisqu’elle se contente de le recopier littéralement. Pour cette deuxième partie de la rédaction des lettres latines, elle a utilisé le De Officina de Ravisius Textor. Dès le 10 septembre 1554 et durant deux mois, elle s’adresse exclusivement à la jeune Élisabeth [30]. La première figure de femme savante qu’elle choisit d’ailleurs de lui proposer pour pouvoir répondre aux garçons est celle de sainte Élisabeth (1156), abbesse du monastère de Schönau, et auteur d’un récit du martyre de sainte Ursule et des Onze mille Vierges.
Puis, pour poursuivre ce catalogue de femmes savantes, Marie reprend la petite encyclopédie de Ravisius Textor au chapitre des mulieres doctae et suit rigoureusement la liste, de la première à la dernière femme savante quasiment. Une première liste avait déjà été mise au point par Plutarque puis augmentée par Boccace avant d’intégrer les encyclopédies du XVIe siècle, dont celle de Tixier. L’humaniste Jean Tixier, dit Ravisius Textor, avait enseigné la rhétorique au collège de Navarre et composé pour ses élèves des ouvrages à succès : Specimen epithetorum (1518), Cornucopia (1519), Officina, partim historicis, partim poeticis referta disciplinis (1520). Il existait alors d’autres compilateurs de personnages illustres comme Battista Fregoso, Rhodiginus et Barthélémy Chasseneux [31]. Toutefois, c’est Tixier qui avait fourni, dans son édition de 1520, la liste la plus longue de femmes savantes. Dans la préface de l’Officina, Tixier précise qu’il est très redevable à Pierre Danès et sans doute l’a-t-il composé avec le concours de Guillaume Budé, Lefèvre d’Étaples et Olivier de Lyon. Son ouvrage aborde des lieux communs très variés qu’il traite brièvement comme les dieux et leur culte, le temps et les saisons, les arts et métiers, les magistrats, les femmes savantes ou encore les hommes illustres. Cette compilation d’anecdotes, tirées de la culture antique et classées thématiquement, était bien sûr à l’usage des étudiants et des savants puisque selon le titre même de l’œuvre, Officina signifie aussi bien l’officine que l’école [32] en proposant un ensemble de références utiles à illustrer toute argumentation [33], et c’est bien l’usage qu’en fit Marie.
Étant dans la résidence royale de Villers-Cotterêts lorsqu’elle commença cette deuxième phase de rédaction, elle ne disposait sans doute que des livres de sa malle. On imagine donc davantage la petite reine avec entre les mains une édition in-octavo, celle de Sébastien Gryphe en deux volumes et datant de 1541, plutôt que l’édition princeps de 1520 qui était un in-folio de plus de 380 folios, imprimé à Paris chez Antoine Aussourd. Il en ressort une liste de soixante-quatre femmes parmi lesquelles Marie retient cinquante-quatre noms. Certaines furent des reines, des saintes ou encore des poétesses et surtout des savantes grecques. Pour la première, Marie a choisi l’abbesse Élisabeth déjà citée puis, dans les lettres suivantes, elle part de la première femme de la liste donnée par Tixier, - « Vous direz encores a ces babillars qu’il i a eu trois Corinnes tres doctes… » -, et elle suit après fidèlement la liste de jour en jour, en tout quinze lettres qu’elle achève d’écrire à Paris en octobre. Elle suit très fidèlement les informations données par Tixier jusqu’à les recopier, en insérant cependant ici et là quelques variantes de vocabulaire :
[…] Polla comme on dit, femme de Lucain a esté de si grande doctrine qu’elle a aidé son mari a corriger les trois premiers livres de Pharsale. Aspasia a enseigné la rhétorique et a esté maitresse de Pericles, et sa femme. Je vous en nommerai demain plusieurs autres. Adieu 11 de septembre [34]
[…] Polla, ut aiunt, uxor Lucani fuit tanta doctrina ut adiuverit maritum in coripiendis tribus primis libris Pharsaliae. Aspasia docuit rhetoricen, fuit magistra Periclis, et tandem uxor. Eras numerabo alias quam plurimas. Vale. 11 Septemb. [35]
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[…] Polla Argentaria, Lucani fuit uxor […] tanta dicitur fuisse doctrina ut maritum adiuuerit, in emendandis tribus primis libris Pharsaliae. […] Aspasia, mulier Milesia, magna doctrinae fama claruit […] Rhetoricem exercuit, fuit Periclis magistra, et tandem uxor. [36]
Comme le montre la correspondance entre les textes, l’exercice n’a pas été très compliqué mais efficace pour démontrer leur tort aux jeunes garçons comme elle l’écrit à Élisabeth : « Retenés diligemment toutes celles que je vous nomme, afin de pouvoir repondre a tous ceus qui tant meprisent notre sexe, disant n’estre affaire aus femmes d’apprendre la langue latine » [en face] « Manda memoriae diligenter omnes quas numerabo, ut possis respondere iis omnibus, quispernunt nostrum sexum, quinque dicunt non esse officium foeminae discere linguam latinam » (lettre 28). Tout au long de cette période d’écriture, elle ne quitte pas le livre de Tixier, ce qui ne veut pas dire pour autant que son instruction se soit, à ce moment-là, limitée à cet ouvrage. Il est en effet permis de penser que l’intervention du maître d’école a été mise entre parenthèses dans le cadre de cet exercice épistolaire et que Marie a pris la liberté de poursuivre pour elle-même la rédaction de ces quinze lettres familières. Pour autant, elle a sans doute bénéficié d’autres leçons du maître comme le laisse deviner l’allusion à un autre livre pendant cette période, à savoir les Colloques d’Érasme et en particulier le dialogue entre Philodoxus et Symbulus sur le sujet de la vraie gloire. L’apport d’Érasme se confirme au cours de cette phase de composition avant d’occuper entièrement la troisième et dernière partie de l’exercice.
La fin du cycle : les « Apophtegmata » d’Érasme
Grâce aux ouvrages évoqués plus haut, Marie Stuart a pu se livrer à un exercice de rhétorique qui apparaît nettement comme une initiation. Les humanistes pédagogues tels que Vivés et Érasme furent, à ce titre, les véritables mais virtuels précepteurs de la jeune reine. Érasme revient d’ailleurs au cours de cette dernière phase de rédaction avec son Apophtegmatum, publié à Paris en 1531 dans un petit format in-16. L’humaniste rotterdamois avait pourtant déjà été censuré depuis quelques années par la Faculté de Théologie de la Sorbonne, la première censure datant de 1527. Pour autant, à n’en pas douter, les éditions scolaires de l’humaniste faisaient partie des livres de la princesse. Les enfants, avant d’entamer plus sérieusement les leçons de rhétorique et de philosophie morale, se contentaient de ces ouvrages fort utiles à l’apprentissage de la conversation et à la mémorisation des lieux communs.
Les éditions érasmiennes des Colloques, des Adages et des Apophtegmata visaient plus l’utilité pédagogique que l’érudition proprement dite. Aussi, face au succès inattendu de la première édition des Colloques, Érasme avait repris son texte pour une nouvelle édition en 1522, assumant pleinement la modestie de la forme au profit de l’utilité du contenu. Contrairement à Guillaume Budé qui avait une conception très élitiste du travail d’écriture, Érasme n’hésitait pas à se prêter à des « bagatelles », à telle point qu’en 1533, il ajouta quarante-sept colloques supplémentaires [37]. Le recours à la vulgarisation des auteurs anciens ne représentait nullement un danger pour sa réputation. Au contraire, il lui plaisait de philosopher à partir de « matières de peu de prix » [38]. Quant au recueil des proverbes latins autrement connus sous le nom d’Adages, il avait été une première fois édité en 1500 à Paris dans un in-quarto et continuellement enrichi par la suite. L’édition de 1508 présentait toutefois une version déjà aboutie avec deux index alphabétique et thématique. Facile d’accès et devenu très populaire, l’ouvrage contribua à la culture des figures symboliques de la Renaissance en mettant à la portée du plus grand nombre les trésors de la littérature antique dont il proposait, de fait, une bibliothèque idéale en joignant à ses éditions un catalogue d’auteurs.
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Parmi les manuels d’Érasme, l’édition des Apophtegmata illustre les multiples talents de leur interprète et son érudition. Le genre des apophtegmes, ou faits et paroles mémorables des hommes illustres, était ancien et leur usage dans l’éducation du prince également. Ils étaient principalement tirés de l’œuvre de Plutarque que Marie Stuart retrouvait donc pour cette troisième et dernière partie de la rédaction des lettres. Les Vies parallèles ainsi que les Œuvres morales du moraliste grec procuraient un très grand nombre d’arguments historiques illustrés par des faits et des paroles, utiles en raison de leur vertu d’exemplarité, certes, mais aussi pour fonder historiquement le discours. Or, Érasme avait préparé l’édition de ces apophtegmes en les enrichissant d’autres auteurs dans l’édition parisienne de 1531. L’ouvrage fut à plusieurs reprises réédité cette même année et au total au moins vingt-deux fois avant 1555. La dédicace était adressée au prince Guillaume, duc de Clèves, alors âgé d’une quinzaine d’années, pour lui proposer l’enseignement utile d’anecdotes historiques pleines de sagesse. Parmi les auteurs anciens, Érasme citait d’abord Aristote qui avait écrit pour le Prince, Cicéron, Théogonis, Isocrate, Valère Maxime, Frontin et surtout Plutarque. Marie a pu utilisé cette édition si son maître l’encourageait à lire plutôt des éditions latines. Il était cependant courant de rencontrer, dans les bonnes bibliothèques, la traduction française d’Antoine Macault, publié à Paris en 1543 dans un format in-16 puis en 1545, là encore dans le même petit format [39]. Antoine Macault occupait, en ce temps-là, la charge de secrétaire et valet de chambre de François Ier, mais il était avant tout un poète et un traducteur. Dans sa dédicace au roi, Macault justifie ainsi le recours aux dits des hommes illustres :
[…] lesquelles congneues par ceulx que le Ciel a esleuz et appellez icy bas, au plus haut et plus digne lieu, degré et tiltre, leur peuvent grandement servir a bien acquérir et conserver celles richesses de l’esprit et entendement humain, sur lesquelles fortune ne peut estendre ses aesles : le tousjours désireux de nous présenter encores chose qui se peult getter dedans les coffres de vostre librairie de chambre en cestuy voyage […] ay choisi entre mes traductions de l’année passée les rapsodies ou marqueterie qu’Erasme a assemblées des Apophthegmes escriptz par ledict Plutarque principalement, et aussi par quelques autres aucteurs. [40]
La vertu rhétorique de l’exemplum convenait particulièrement bien à l’instruction du prince en lui proposant des modèles illustres de gouvernants, le plus souvent, ou encore de philosophes. Les apophtegmes, en tant que sentences ou paroles mémorables, étaient donc présentés comme une matière sage et plaisante, « digne de prince », pour lui procurer autant de « richesses de l’esprit » que de plaisir. Les dits notables des hommes illustres, par la brièveté de la formule, constituaient de bons supports pour l’apprentissage de la lecture, mais à l’âge de douze ans à peine puisqu’elle fêta son anniversaire en décembre, Marie trouvait bien plus dans ces écrits gnomiques. Dans ses lettres, elle n’eut pas recours à n’importe quelle édition d’apophtegmes, mais a bien utilisé celle d’Érasme puisqu’elle reprend également ses commentaires. De nouveau, sans recopier littéralement le texte source, elle s’en inspire totalement en l’abrégeant et en reprenant la plupart des termes. Or, à ce niveau de l’exercice, il est difficile de reconstituer la leçon. Cette dernière durait déjà depuis quatre mois sans présenter une grande cohérence. En effet, la parenthèse sur les femmes savantes laisse supposer que Marie Stuart avait pris goût à ses petites lettres mais sans plus chercher à ordonner un discours puisqu’elle se contenta de recopier Textor sans même apporter de commentaires ou presque. La leçon était-elle finie ? Certes non, en revanche, le maître fut sans doute beaucoup mois présent car Marie retourna à son exercice de rhétorique à la fin du mois de novembre et rédigea vingt-et-une lettres à partir des apophtegmes d’Érasme :
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Marie (d’après la version française de la lettre n°47) : « Perillus un des amis d’Alexandre luy demanda douaire pour ses filles. Le Roi commanda qu’il prist cinquante talents. Perillus repondit que dix seroient assés. C’est asses a toi (dit Alexandre) d’en recevoir autant, mais a moi non de n’en donner qu’autant. » [41]
Érasme (d’après l’édition de Macault en 1545) : « Perillus l’ung des amys d’Alexandre luy demanda quelque don pour le mariage de ses filles : lors le Roy commanda qu’on luy delivrast trente mille écus. Et quand Perillus luy eut respondu, que c’estoit assez de six mil escuz. Alexandre dit c’est assez à toy d’enprendre six mil/ Mais ce n’est pas assez à moy de n’en donner non plus. » [42]
Marie (lettre latine n° 47) : « Perillus unus amicorum Alexandri, ab Alexandro petijt dotem pro suis filiabus. Rex iussit ut acciperet quinquaginta talenta, Perillus respondit decem satis esse. Sufficeret tibi inquit Alexander, tantum accipere, sed mihi non satis est tantum dare. »
Érasme (Apophtegmatum) : « Perillus unus ex amicorum Alexandri numero, filiabus suis ab Alexandro dotem petijt. Iussit rex illum capere talenta quinquaginta. Qumque ; is respondisset decem satis esse, Tibi quidem, inquit, satis est tantum accipere, mihi uerò non satis est tantum dare. » [43]
Elle fait de même avec les commentaires d’Érasme insérés à la suite des apophtegmes dans l’édition de 1548, ce qui ne l’empêche pas de conclure elle-même le plus souvent, comme dans la lettre 57 du 31 décembre, à la suite d’une sentence d’Aristippe : « Mais nous qui avons assez de richesses, ma sœur, efforçons-nous d’acquérir de la doctrine » [en face] « Satis habemus opum, soror, conemur adipisci doctrinam ». Au cours de cette dernière rédaction, Marie commence par traiter de la nécessité et de la vertu d’apprendre, puis elle passe subitement à Alexandre le Grand et lui consacre quatre lettres sur le sujet de la libéralité dont deux à destination du dauphin François (lettres n°53 et 54). Elle revient plus tard à lui mais butine plus qu’elle ne suit l’ouvrage fidèlement, passant d’Agésilas à Denys, de Socrate à Lycurgue, ou encore de Diogène à Mithridate. Elle ne retient que des leçons profitables à la vertu du prince mais ne construit plus un discours argumenté comme dans la première phase de l’exercice épistolaire. En revanche, ses lettres prennent parfois un caractère plus personnel, s’informant de la santé du roi ou s’excusant de ne pouvoir écrire plus longuement à cause d’un mal de dent.
La petite reine qui passait pour une jeune femme érudite apparaît ici comme une élève travaillant des contenus adaptés à son âge, ayant recours à un panel d’ouvrages limités en nombre et très faciles d’accès. Si les plans d’études pour le prince étaient donc ambitieux à l’époque, tous n’y excellèrent pas, hormis peut-être Edouard VI et Elisabeth Ière. Quoi qu’il en soit, la leçon de Marie illustre bien une des préoccupations majeures du précepteur affichées en son temps par Nicole Oresme, à l’adresse de Charles V, à savoir que le prince doit être savant et non philosophe. Les ouvrages qui sont alors mis à sa disposition répondent à l’ambition de rendre le prince suffisamment sage à partir d’un enseignement très focalisé sur sa dignité future. Les lettres d’Édouard VI révèlent, elles aussi, cette habitude donnée au prince d’argumenter sur son propre savoir et la nécessité de s’instruire. Dans cette perspective, le programme scolaire est conforme aux plans d’études contemporains tandis que les ouvrages en usage sont le plus souvent des éditions latines de petit format. Toutefois, ce dernier n’est pas une condition des livres d’études pour le prince comme en témoigne le fonds de la bibliothèque de l’Escurial pour les études du futur Philippe II d’Espagne. En revanche, tous ces ouvrages se distinguent par leur contenu moral et donc leurs visées pédagogiques en privilégiant le genre encyclopédique et les recueils de sentences mais aussi, dans le cas de cette leçon, le recours à des institutions du prince. Plutarque, Érasme, Ravisius Textor, Vivès, Jean Brèche, Ésope et Cicéron suffisent à la petite reine pour argumenter son discours et comprendre
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pourquoi il est si important d’instruire le futur gouvernant. Mais l’exercice étant très simplifié pour s’adapter au jeune âge de Marie, celle-ci s’éloigne très peu de ces ouvrages pour illustrer son propos et construire son discours même si elle fait souvent l’effort d’en tirer sa propre conclusion, signe que la rhétorique était précocement enseignée.
Sylvène Édouard
Université Jean Moulin Lyon 3
LARHRA UMR CNRS 5190
Notes
[1] Les lettres latines de Marie Stuart, Bibliothèque nationale de France [BnF], manuscrit [ms] latin 8660. L’édition critique de ces lettres est à paraître chez Droz.
[2] L’inventaire de la bibliothèque d’études d’Édouard VI a été édité par John G. Nichols en 1857 dans Literary Remains of King Edward the Sixth (Londres, Roxburgh Club), p. cxxxv. Pour Philippe II, voir José Luis Gonzalo Sánchez-Molero, La « Librería rica » de Felipe II : estudio histórica y catalogación, Escorial, R.C.U. Escorial, 1998 ; « Los libros en la educación de Felipe II (1534-1545) », Felipe II en la Biblioteca Nacional, Madrid, Electa, 1998, p. 13-18 ; El erasmismo y la educación de Felipe II (1527-1557), Madrid, Universidad Complutense, 2004.
[3] Les inventaires des livres qu’elle possédait en Écosse ne précisent par leur provenance. Voir Julian Sharman, The Library of Mary Queen of Scots, London, 1889 et John Durkan, « The Library of Mary, Queen of Scots », Innes Review, vol. 38, 1987, p.71-104.
[4] Seules les Institutions du prince ont bénéficié d’études nombreuses. Voir Paolo Carile (dir.), La Formazione del Principe in Europa dal Quattrocento al Seicento. Un tema al crocevia di diverse storia, Paris, Aracne, 2004.
[5] Voir les travaux d’Ann Blair sur le sujet et en particulier : « Lectures on Ovid’s Metamorphoses. The Class Notes of a 16th-Century Paris Schoolboy », Princeton University Library Chronicle, vol. L, n°2, winter 1989, p. 117-144 ; « Note Taking as an Art of Transmission », Critical Inquiry, Vol. 31, n°1, Autumn 2004, p. 85-107 ; « Student Manuscript and the Textbook », Scholarly Knowledge. Textbooks in Early Modern Europe, Emidio Campi, Simone de Angelis, Anja-Silvia Goeing and Anthony T. Grafton (dir.), Genève, Droz, 2008, p. 39-73.
[6] Ils ne furent traduits que vers la fin des années 1550, entre autres avec Les dicts des sept sages de Charles Fontaine en 1557. Quant à Plutarque qui était très apprécié des précepteurs, à l’exception d’éditions vernaculaires d’opus moraux isolés - De la Fortune des Romains en 1503 et De la fortune et vertu d’Alexandre par Guillaume Budé, ou La touché naïsve pour esprouver l’amy et le flatteur et L’art de soy et par bon moyen faire son pofit de ses ennemis par Antoine du Saix à partir d’Érasme en 1537 -, les premières editions complètes furent celles de Jacques Amyot en 1559 pour les Vies parallèles et en 1572 pour Les Oeuvres morales et meslées de Plutarque.
[7] Érasme, De duplici copia verborum ac rerum commentarii duo. Erasmi de ratione studii pueris instituendis commentariolus, Bâle, Froben, 1517, in-4° et De conscribendis epistolis, Bâle, Froben, 1521, in-8°. Pierre Fabri, Le Grand et vrai Art de Pleine Rhetorique, Rouen, Thomas Ryer et Simon Gruel, 1521, in-8° ; Omer Talon, Rhetorica, Paris, 1548 ; Pierre de la Ramée, La Dialectique, Paris, André Wechel, 1555 ; Antoine Fouquelin, La Rhétorique françoise, Paris, André Wechel, 1555.
[8] Juan Luis Vivès, Ioannis Lodovici Vivis Valentini. Introductio ad Sapientiam. Eiusdem Satellitium siue Symbola. Eiusdem Epistolae duae de ratione studii puerilis, Lovanii, Apud Petrum Martinum Alostensem, in-8°, 1524 ou l’édition de 1539 : De Ratione studii puerilis, deque uita iuuentutis instituenda, ac moribus studiisque corrigendis, opuscula diuersorum autorum perquam erudita, quæ uersa pagella enumerantur, Bâle.
[9] Juan Luis Vivès, Jo. Lodovici Vivis,... de Institutione foeminae christianae,... libri tres, mira eruditione, elegantia, brevitate, facilitate, plane aurei, pietateque et sanctimonia, vere christiani, christianae in primis virgini, deinde maritae, postremo viduae, novo instituendi argumento longe utilissimi, Antverpiae, 1524, in-4°.
[10] Érasme, Catonis disticha moralia, Paris, Josse Bade, 1523, in-8°.
[11] Sir Thomas Elyot, The Book named the Governour, Londres, T. Berthelet, 1531.
[12] Lettres latines … op.cit., 3v. – 4r.
[13] Vivés, De ratione … op.cit., 1539, p.4 : « Et quatenus Deus non dat numera sua ociosis, ideo labore et diligentia in studiis literarum et uirtutis opus est. »
[14] Charles Fontaine, Les Dicts des Sept Sages, ensemble plusieurs autres sentences latines extraites de divers, bons et anciens auteurs, avec leur exposition françoise, Lyon, 1557, p.75.
[15] Ce fut la thèse défendue par Antoine de Montaiglon dans son édition des Latin Themes of Mary Stuart, Queen of Scots, Londres, 1855.
[16] Voir l’article d’Ann Blair sur l’importance de la réception à travers la prise de notes : « Note Taking as an Art of Trnasmission », art. cit., p.85.
[17] Lettres latines … op.cit., f. 5v. – 6r. ; Vivés, op.cit, 1539, p.149, n°202 : « […] et more Apellis Coi pictoris, qui tanta fuit in arte sua diligentia, ut nullus præteriret dies tan alijs rebus occupatus in quo non ipse saltem lineam aliquam penicillo duxisset. »
[18] P. Galand-Hallyn, F. Hallyn, et T. Cave, Poétiques de la Renaissance, Genève, Droz, 2001, p.377.
[19] Plutarque, Plutarchi Chaeronei… Opuscula moralia, Lyon, Seb. Gryphe, 1542, in-8.
[20] Plutarque, Les Œuvres Morales et meslees de Plutarque, Tanslatees de Grec en François par Messire Jacques Amyot, à présent évêque d’Auxerre, conseiller du Roy en son privé Conseil et grand Aumosnier de France, Paris, Michel de Vascosan, 1572.
[21] Voir en particulier l’ouvrage d’Érasme : Declamatio de pueris statim ac liberaliter instituendis, Bâle, Jean Froben, 1529.
[22] Jean Brèche, Manuel royal, ou Opuscules de la doctrine et condition du prince : tant en prose, que rythme françoyse. Commentaire de Plutarcque autheur grecque de la Doctrine du Prince : tanslaté en Françoys. Les Octantes preceptes d’Isocrates du régime et gouvernement du Prince, et de la Republique, aussi tournez en Françoys, Tours, Mathieu Chercelé, 1541, in 4°.
[23] Jean Brèche, Premier livre de l’honneste exercice du prince, à Madame la princesse de Navarre, Paris, à l’enseigne de la Fontaine, 1544 ; Les Aphorismes d’Hippocrate avecq le commentaire de Galien, Paris, 1550 ; Aphorismi iurisdiprudentia, opus aduocatis, Parisiis, P. Le Preux, 1552 ;Promptuaires des loix municipales et coustumes des bailliages, Tours, J. Rousset, 1553.
[24] Jean Brèche, op.cit., 1541 : « En apres il fault se donner garde que ceulx avecques lesquelz les jeunes princes frequenteront et converseront familierment, ne soient de corrompue et mauvaise vie : et si aulcuns se trouvent, les chasser, et punir griesvement. Car tout ainsi que digne est de griesve mort celluy qui aura emppoisonne une fonteine publique, de laquelle ung chascun boit, ainsi celluy qui aura envenymé et infecte le cœur du Prince de maulvaises opinions, dautant quil rendonde au grand dommaige et perdition de tous. »
[25] Lettres latines … op.cit., f.14v.
[26] Ibid., f. 23v., lettre 19 : « Vous ebahisses, ma seur, pour quoi je sorti hier de la chambre de la Royne, veu qu’il estoit dimenche, pour aller en mon estude. Croies que depuis deux jours je li un colloque d’Erasme, qu’il appelle diluculum, tant beau, tant joieus, et tant utile que rien plus. Hé Dieu comme il tanse ceux qui dorment si tard, et font si peu de cas de perdre le temps, qui entre toute chose est la plus precieuse. Davantage le latin i est si facile, et si élégant, qui n’est possible d’estre plus poli. Je le vous expliquerai aujourd’hui si j’ai loisir. Adieu ce 20 d’Aoust. »
[27] Érasme, Familiarium colloquiorum formulae in gratiam juventutis, Bâle, Froben, 1519, in-8°.
[28] Cicéron, M. T. Ciceronis Sententiae insigniores, Lyon, Guillaume Rouillé, 1552, in-16.
[29] Lettres latines … op.cit., lettre 26, f.34v.
[30] Jean Tixier, Officinae Joannis Ravisii Textoris epitome, Lyon, Sébastien Gryphe, 2 vol., 1551, in-8°.
[31] Jean Céard, « « Liste des femmes savantes au XVIe siècle », Femmes savantes, savoir de femmes : du crépuscule de la Renaissance à l’aube des Lumières, études réunies par Colette Nativel, Actes du colloque de Chantilly, 22-24 septembre 1995, Genève, Droz, 1999, p.85-94.
[32] Marie-Madeleine de La Garanderie, La Correspondance d’Érasme et de Guillaume Budé. Traduction intégrale, annotations et index biographique, Paris, Vrin, 1976. L’auteur préfère traduire par « magasin ».
[33] Jean-Eudes Girot, Pindare avant Ronsard, Genève, Droz, « Études ronsardiennes », vol.6, 2002, p.61.
[34] Lettres latines … op.cit., f.36v.-37v.
[35] Ibid., f.37r.-38r.
[36] Jean Tixier, op.cit., 1551, p.265.
[37] Franz Bierlaire, Érasme et ses Colloques : le livre d’une vie, Genève, Droz, 1971, p.51.
[38] Lettre d’Érasme à Budé du 28 octobre 1516, dans Marie-Madeleine de La Garanderie, op.cit., p.73.
[39] Antoine Macault, Les Apophthegmes translatées en français par A. Macault, on les vend à Paris, 1543, in 16°, et Les Apophthegmes, c’est à dire promptz, subtilz et sententieulx ditz de plusieurs royas, chefs d’armées, philosophes et autres grands personnaiges, Paris, chez Jean de Marnef, 1545, in 16°.
[40] Antoine Macault, op.cit., 1545.
[41] Lettres latines … op.cit., f. 67v.
[42] Ibid., f.192v.
[43] Érasme, Apophtegmatum ex optimis utriusque liguae scriptoribus per Des Erasmum Roterodamum collectorum libri octo, Lyon, Sébastien Gryphe, 1548, p.256.