Le Cardinal de Bernis. Le pouvoir de l’amitié
Gilles Montegre
Gilles Montegre, Le Cardinal de Bernis. Le pouvoir de l’amitié, Paris, Tallandier, 2019.
Poète et homme d’Église, ami des papes et de Voltaire, chantre de la nature et amoureux des beaux-arts, modèle des ambassadeurs et artisan de la révolution diplomatique qui réconcilia la France des Bourbons et l’Autriche des Habsbourg : le cardinal de Bernis (1715-1794) incarne à lui seul la singularité du XVIIIe siècle.
Fondé sur la découverte d’archives épistolaires privées d’une richesse exceptionnelle, ce livre renouvelle en profondeur la vision que l’on se faisait du personnage mais également du siècle qu’il a traversé. La légende du prélat libertin cède la place à la réalité d’un cardinal diplomate qui érigea l’amitié en principe de vie et en arme de pouvoir. Homme d’Ancien Régime par ses idées, Bernis fut par ses pratiques un homme des Lumières. Car celui que Stendhal assimilait à une « figure héroïque » n’a pas seulement œuvré à « reconquérir pour la France le cœur et l’esprit des Italiens ». De façon très moderne, Bernis a utilisé la culture comme un redoutable soft power dans les relations internationales, encouragé la place des femmes dans la société politique, et anticipé la crise de la monarchie qui allait conduire à la Révolution française.
Grâce aux correspondances féminines du cardinal de Bernis, on comprend que le XVIIIe siècle ne fut pas seulement celui du libertinage mais aussi celui de singulières amitiés sentimentales. Par ses échanges épistolaires avec les ministres et diplomates de son temps, on découvre combien le langage affectif s’immisce au cœur de l’action politique. Le lecteur n’entre donc pas seulement dans l’intimité du cardinal de Bernis : c’est aussi une nouvelle Europe de la diplomatie et de la culture qui lui est donné à voir.