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Liberté de parole. Les élites savantes et la critique des pouvoirs, Orient et Occident, VIIIe-XIIIe siècle

Marie-Céline Isaïa, Makram Abbès (éd.)

ISAÏA Marie-Céline, ABBÈS Makram (éd.), Liberté de parole. Les élites savantes et la critique des pouvoirs, Orient et Occident, VIIIe-XIIIe siècle, Turnhout, Brepols, 2023.

ISBN : 978-2-503-59726-3

La parrhésia antique idéalisée, cette parole franche qu’autorise et exige la démocratie, devrait disparaître avec l’installation des pouvoirs souverains du Moyen Âge. De fait, la répression légale des paroles sacrilèges signale la naissance de la théocratie pontificale et de l’État moderne au tournant des XIIIe et XIVe siècles. L’absolutisme va de pair avec une réduction de la liberté de parole à un simulacre politique.

Entre le VIIIe et le XIIIe siècle cependant, en Occident latin, en Islam et dans l’empire byzantin, des pouvoirs souverains qui disent tenir de Dieu leur autorité voient leurs élites religieuses continuer à revendiquer et à pratiquer une forme de liberté de parole. Ces élites exercent une critique justifiée par leur maîtrise de la tradition écrite et par leur expérience du gouvernement. Elles envisagent la liberté de parole comme un devoir religieux vis-à-vis du prince, en appellent à sa conscience et l’exhortent à être à la hauteur du pouvoir reçu de Dieu. Leurs paroles critiques prennent aussi un public à témoin, dans le cadre d’un rituel politique qui n’est jamais parfaitement contrôlé ni instrumentalisé. Elles contribuent ainsi à associer une large communauté, fondée religieusement, à l’exercice du pouvoir.En comparant la liberté de parole assumée par ces élites médiévales, c’est donc le fonctionnement des empires du Moyen Âge central qu’on analyse – des empires dont l’assise théocratique reste compatible avec la critique et implique la participation sous contrôle d’une partie des populations. Au début de la période, celui qui critique le prince lui donne un gage de fidélité ; il déclare que le pouvoir exercé peut être amélioré. À la fin de la période, le critique fait d’abord valoir son amitié pour le souverain – indice de la réduction de l’assise collective de ces régimes.

Sommaire

Avant-propos

Introduction

Michel Senellart, Le concept chrétien de parrhèsia, de Peterson à Foucault
Marie-Céline Isaïa, Point de départ : la liberté de parole, IVe-IXe siècle

Porte-paroles

Makram Abbès, De la parrhèsia à l’art du conseil. La liberté de parole dans Kalila et Dimna
Vincent Déroche, La liberté de parole de Théodore Stoudite (759-826) 
Louise Marlow, Les miroirs aux princes et la critique de l’autorité royale dans l’Orient samanide. Concepts et contraintes
Maïté Billoré, La parole critique à la cour Plantagenêt. Formes et enjeux d’une pratique politique à travers les lettres de Pierre de Blois 
Gisèle Besson, Un regard sur le gouvernement de l’Église dans la Chronique de Salimbene de Adam. Le discours critique d’un franciscain (XIIIe s.) 

Communication

Mohamed Ben Mansour, Essai sur la parrhèsia poétique à l’époque abbasside 
Giacomo Vignodelli, Satire et critique allusive dans l’Europe post-carolingienne 
João Vicente de Medeiros Publio Dias, Critique et représentation de soi. Les discours de Jean l’Oxite à Alexis Ier Comnène (1081-1118) en contexte 
Leidulf Melve, La liberté d’expression durant la Querelle des Investitures 
Vanessa Van Renterghem, L’admonestation (waʿẓ) au souverain selon Ibn al-Ǧawzī (m. 1201). Instrument de critique du pouvoir ou simple topos ? 

Politiques

Warren Pezé, Vestra fidelis devotio ammonere curabit. La critique du pouvoir au début du règne de Charles le Chauve 
Rosa Benoît-Meggenis, La critique politique des moines dans l’empire byzantin (IXe-XIIIe siècle). La liberté de parole au service de l’autorité impériale 
Neguin Yavari, Progressive et illibérale: la critique ash‘arite de la situation politique du XIe siècle 
Benjamin Bourgeois, Quand l’abbé de Skévra nie la royauté du roi d’Arménie. Orientations religieuses et contestation politique dans l’Orient chrétien à la fin du XIIIe siècle 
Olivier Brisville-Fertin, La critique de l’alfaqui au roi ou la prépondérance du sabio selon un exemplum en aljamiado 

Liberté de parole. Éléments de conclusion, Benoît Grévin et Annick Peters-Custot

Index des noms de personnes

Marie-Céline Isaïa, membre junior de l’Institut Universitaire de France, est maître de conferences en histoire médiévale de l’Université Jean-Moulin Lyon3, habilitée à diriger des recherches, chercheur du laboratoire CIHAM-UMR 5648 – Histoire, archéologie, littératures des mondes chrétiens et musulmans médiévaux où elle dirige le thème Savoirs et Autorités.

Makram Abbès est professeur d’études arabes à l’École Normale Supérieure de Lyon et chercheur du laboratoire TRIANGLE-UMR 5206 Action, discours, pensée politique et économique.