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Monument royal et monumentalité urbaine dans la France moderne : une question de point de vue

Etienne Jollet

Etienne Jollet, " Monument royal et monumentalité urbaine dans la France moderne : une question de point de vue ", dans La Monumentalité urbaine, journée d’étude, novembre 2011

Extrait de l’article

Monument, monumentalité : deux termes si proches qu’ils semblent devoir être naturellement associés. Pourtant, immédiatement, un doute apparaît : le monument, étymologiquement, renvoie à l’idée du souvenir, de la commémoration ; monumentalité, du côté de ce qui structure un paysage urbain ; le terme de « monument », dans cette acception, peut être utilisé pour désigner des édifices, ou plus largement encore des réalisations architectoniques particulièrement remarquables dans ce même paysage. On peut dès lors considérer qu’il s’agit somme toute d’une simple erreur de perspective historique : de fait, pour la période et le territoire qui nous intéresse, la France des temps modernes, le terme de monumentalité n’existe pas dans son acception actuelle (ce sens n’apparaît qu’en 1835). Pourtant ces deux valeurs peuvent être décrites l’une et l’autre par la définition que donne déjà Alberti dans son De Aedificatoria, traduit en français par Jean Martin en 1553, du monument comme « merque (sic) publique ». La formule reste stable aux XVIIe et XVIIIe siècles. Elle s’accompagne du fait que le monument désigne « tout ouvrage d’architecture ou de sculpture » à valeur mémorielle, ainsi sous la plume de Jacques-François Blondel au milieu du XVIIIe siècle. Cela signifie que la visibilité du monument fait partie du projet initial : rien d’étonnant à ce qu’un d’Aviler puisse dès lors le décrire comme un « bâtiment ». Bien au contraire, l’urbanisme de la France moderne se caractérise par la définition d’un modèle original, la place royale, qui confère à l’effigie du monarque un rôle de choix dans l’espace de la ville, le tout inscrit dans un long processus d’embellissements. Au cœur de ce rapport au monument : la question du point de vue. Il s’agit en effet de voir le monument dans l’espace urbain ; de voir le monument dans son contexte particulier, celui de la place royale ; d’étudier la manière dont est pensé le rapport entre architecture et sculpture – avant que l’importance nouvelle octroyée à la nature oblige à dépasser une opposition désormais inopérante.

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