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Projet de Labrouste pour le tombeau de l’empereur Napoléon. Essai d’interprétation symbolique de l’architecture romantique

Martin Bressani

Martin Bressani, "Projet de Labrouste pour le tombeau de l’empereur Napoléon. Essai d’interprétation symbolique de l’architecture romantique", dans Revue de l’Art, année 1999, volume 125, numéro 125, p. 54-63.

Extrait de l’article

La révolution romantique, dans tous les domaines qui constituent la culture européenne, est animée par une motivation double et contradictoire : d’une part, la volonté de bri­ser le formalisme académique pour gagner une emprise nouvelle sur la réalité et, d’autre part, le désir de s’affranchir des limites du réel par l’imagination poétique. Cherchant à concilier le matériel et le spirituel, l’esprit de l’époque envisage toutes choses sous deux aspects, dans leur reflet à moitié lumineux, à moitié obscur, d’une réalité supérieure.

L’architecture, mélange d’art et de science, est particulièrement sen­sible aux forces contradictoires qui sous-tendent cette quête. L’archi­tecte, qui participe nécessairement aux modes de production de son époque, est très conscient de l’em­prise du réel. Mais, fidèle à sa voca­tion de bâtisseur de temple, il réfléchit à la dimension symbolique du monde.

L’attrait simultané et apparem­ment paradoxal qu’éprouvent les architectes romantiques français pour le Moyen âge et pour les nouvelles techniques illustre bien la tension entre les aspirations spirituelles et la volonté d’embrasser le réel. Ainsi, on observe dans les pages de la Revue générale de l’architecture et des tra­vaux publics, principale phalange du mouvement en France, une juxta­position étonnante de longues chroniques sur les plus récentes dé­couvertes techniques et d’essais très érudits de symbolique chrétienne. Le directeur de la Revue, César Daly, élabore consciemment le pro­gramme d’une double analyse de l’architecture, « en interrogeant successivement les sentiments du cœur et les dictées de la raison ». Le mo­nument doit être considéré à la fois dans sa dimension rationnelle, constructive, qui le légitime par rapport à son époque, et dans son aspect poétique, marque d’un langage plus profond, antérieur à toute réflexion.

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