Un vase de Sèvres retrouvé au musée de Trieste
Gérard Auguier, Gérard Mabille
Gérard Auguier / Gérard Mabille, "Un vase de Sèvres retrouvé au musée de Trieste", dans Revue de l’Art, année 1997, volume 116, numéro 1, p. 61-65.
Extrait de l’article
« II nous était réservé de retrouver au fond de la mer Adriatique le tombeau de deux filles de roi dont nous avions entendu prononcer l’oraison funèbre dans un grenier à Londres. Ah ! Du moins la tombe qui renferme ces nobles dames aura vu une fois interrompre son silence ; le bruit des pas d’un Français aura fait tressaillir deux Françaises dans leur cercueil. Les respects d’un pauvre gentilhomme, à Versailles, n’eussent été rien pour des princesses ; la prière d’un chrétien, en terre étrangère, aura peut-être été agréable à des saintes ».
Ces deux princesses sur la sépulture desquelles Chateaubriand vint se recueillir en 1806 étaient les deux dernières survivantes des nombreuses filles nées de l’union de Louis XV et de Marie Leczinska. Adélaïde naquit en 1732 et Victoire en 1733. Après la mort de leur père en 1774, Mesdames durent à la générosité de leur neveu Louis XVI la propriété du château de Bellevue sur les coteaux de Sèvres ; c’est là qu’elles vécurent le plus clair de leur temps, jusqu’aux sombres événements de la Révolution.
Quand l’Assemblée décréta la Constitution civile du clergé, le 12 juillet 1790, que Louis XVI sanctionna le 28 juillet, Mesdames formèrent le projet d’émigrer. Rome leur parut une destination naturelle. Leur fuite ne se fit pas sans difficultés : Mesdames quittèrent Paris le 19 février 1791 vers 10 heures du soir ; elles atteignirent le 21 Arnay-le-Duc où elles furent bloquées par le « zèle » et le « civisme » des autorités. Elles ne purent en repartir que le 3 mars, après onze jours de captivité. Le samedi 12 mars, Mesdames entrèrent dans Turin, que le 26 mars, elles quittèrent pour Parme où elles furent reçues par leur neveu Ferdinand.