Scénographie des jardins de "plantes et arbres curieux" 1537-1631
Laurent Paya
Laurent Paya. « Scénographie des jardins de "plantes et arbres curieux" 1537-1631 », dans Curiositas, Université de Poitiers (http://www.curiositas.org/document.php?id=1554).
Extrait de l’article
Dans Le thrésor des Parterres de l’univers Daniel Loris, médecin des ducs de Wurtemberg, invoque la nécessité de perfectionner la nature en compartimentant l’espace, en concevant des « chambrettes » et « lieux de réserves » jardinés destinés à recevoir une collection de végétaux cultivés remarquables. Un « programme » pour « Jardins de plaisir, tracés en compartimans, & garnis de plantes, & arbres curieux " nous est donné, il s’apparente à celui des cabinets de curiosités.
Le mot allemand Wunderkammer signifie « chambre de merveilles » et désigne les collections des princes d’Europe à partir des années 1560-1570. Ce phénomène repose sur un regain d’intérêt pour l’antique, pour les sciences naturelles et la géographie. Cette démarche universelle et rationnelle est associée à un goût pour le particulier, l’exotique, le rare, le varié, voire le bizarre et l’anormal ; on nommait merveilles ces curiosités et raretés de toutes sortes. Ainsi, à partir du début XVIIe siècle, les exubérantes et diversifiées bulbeuses exotiques nouvellement introduites – tulipes, jacinthes ou couronnes impériales–, sont rassemblées dans des collections. Ada Segré mentionne des espèces réputées monstrueuses qui passionnent les amateurs : lis martagon gigantesque à cinquante fleurs, rosier dont les fleurs sont à étages multiples ou genêt porteur des fasciations. De même, les obtentions d’un savoir-faire horticole prodigieux – plants de vigne greffés sur citronnier ou rosiers greffés sur jasmin–, sont les attractions supposées des jardins du Grand-duc de Toscane.