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« La gloire de nostre sexe » : savantes et lectrices dans Les dames illustres (1665) de Jacquette Guillaume

Jean-Philippe Beaulieu

Beaulieu, Jean-Philippe, "« La gloire de nostre sexe » : savantes et lectrices dans Les dames illustres (1665) de Jacquette Guillaume", Études françaises, vol. 47, n° 3, 2011, p. 127-142

Résumé de l’article

Parmi les recueils de femmes illustres publiés au XVIIe siècle, l’ample ouvrage de Jacquette Guillaume intitulé Les dames illustres où par bonnes et fortes raisons, il se prouve, que le sexe feminin surpasse en toute sorte de genres le sexe masculin (Paris, Thomas Jolly, 1665) se singularise par la façon dont il s’attache à démontrer le savoir féminin en attribuant de longs discours érudits à des contemporaines, principalement françaises, désignées de manière allusive (« Mademoiselle **** »), avec qui l’auteure semble entretenir des liens de familiarité. Ces « portraits parlants », qui prouvent la réalité d’un savoir féminin représenté par des femmes qui ne se sont pas encore distinguées sur la scène publique, indiquent qu’être illustre n’implique donc pas une notoriété préalable, mais simplement des dispositions que le texte de Guillaume a pour fonction de rendre publiques. Par l’usage systématique de la citation directe ou indirecte, le texte donne existence à un cercle virtuel mais étendu de femmes savantes, dont Élisabeth d’Orléans, la dédicataire, serait la marraine et l’auteure, la porte-parole. Contrastant avec son attitude négative à l’égard des hommes, les efforts que déploie Guillaume pour mettre en valeur une communauté hypothétique de femmes suggèrent que les Dames illustres visent principalement un public féminin que l’on invite à suivre les exemples fournis par l’ouvrage. En tant qu’aperçu — en grande partie fictif — d’un savoir qui embrasse des disciplines comme la théologie et la géographie, généralement étrangères à l’expérience féminine, le livre de Guillaume serait tendu vers les lectrices tel un miroir qui réfléchit tout à la fois les qualités de l’auteure, de la dédicataire et des diverses savantes, pour faire la preuve irréfutable que le savoir féminin représente désormais un fait avéré.

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