La Saint-Barthélemy dans la littérature française
Jacques Bailbé
Jacques Bailbé, La Saint-Barthélemy dans la littérature française, dans Revue d’histoire littéraire de la France, année 73 (1973), n. 5, p. 771-777.
Extrait de l’article
Le massacre de la Saint-Barthélémy a fait entrer dans la littérature française les sanglantes fureurs de la guerre civile, avec son cortège de crimes, de luttes fratricides, de faiblesses et d’héroïsmes, de soupçons et d’effrois. «Monstrueuse guerre, écrit Montaigne: les autres agissent au dehors; cette-cy encore contre soy se ronge et se desfaict par son propre venin». Si, chez les contemporains, du côté des protestants, le massacre suscita d’innombrables pamphlets et discours en prose, les poésies huguenotes sont rares. Les Mémoires de l’État de France contiennent quelques vers d’Antoine de Chandieu consacrés à la mort de Coligny, le chef spirituel des protestants, celui que d’Aubigné saluera comme «notre Caton», Voltaire comme «le plus grand des Français», et Michelet comme «un très grand citoyen». La poésie de combat s’en prend avec violence au cardinal de Lorraine, qui forme, dans le Dialogisme sur l’effigie de la Paix, un couple infernal avec Catherine de Médicis, nouvelle Jézabel; à Charles IX qui, par sa trahison, est associé à ses mauvais conseillers. Seul le très beau Cantique sur la Saint-Barthélémy, d’Etienne de Maisonfleur, prolonge, par sa dimension épique et religieuse, les grands psaumes de souffrance et de colère de la Bible.