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Madame de Lafayette romancière: aspects de la société et des mentalités de son temps

Marie-Odile Sweetser

Marie-Odile Sweetser, "Madame de Lafayette romancière: aspects de la société et des mentalités de son temps", dans Cahiers de l’AIEF, année 1994, volume 46, numéro 46, p. 11-29.

Extrait de l’article

Maurice Lever a relevé à juste titre le curieux paradoxe du genre romanesque au XVIIe siècle: maltraité, voir méprisé par un critique tel que Boileau (…) mais ayant connu auprès du public un succès considérable, attesté par les chiffres éloquents des ventes.
(…)

Parmi cette vaste production, celui qui, dès sa parution, a provoqué de vives réactions auprès d’un large public cultivé, mondain plutôt que docte, et qui est devenu le modèle reconnu du roman classique ou du roman d’analyse au cours des siècles qui ont suivi, reste La Princesse de Clèves. Comme le remarque son savant éditeur : « aucune œuvre littéraire du XVIIe siècle, fût-ce Le Cid, n’a donné lieu immédiatement à critique plus ample, plus variée, plus intéressante, que La Princesse de Clèves ».
« La synthèse de cette première critique a été faite plusieurs fois », ajoute Jean Mesnard ; il cite parmi d’autres les Lectures de Madame de Lafayette de Maurice Lau-gaa, qui vient de nous donner une très complète étude de la critique récente avec une bibliographie présentée dans l’ordre chronologique.

Le début de l’important renouveau critique des vingt-cinq dernières années a été marqué par l’étude consacrée à La Princesse de Clèves par Henri Coulet dans son indispensable et fondamental ouvrage, Le Roman jusqu’à la Révolution, et la consécration de la romancière au panthéon des grands classiques par d’importantes éditions : celle de La Princesse de Clèves à l’Imprimerie Nationale, procurée par Jean Mesnard, dont la présentation « aussi dense que discrète » reste particulièrement précieuse ; celle des Romans et nouvelles procurée par Alain Niderst, auteur de plusieurs études sur le chef-d’œuvre de Mme de Lafayette; celle des Œuvres complètes procurée par Roger Duchêne, auteur d’une passionnante biographie de la romancière «aux cent bras » et qui avait participé avec d’autres éminents spécialistes au supplément de Littératures classiques consacré aux deux Princesses. La surabondance d’articles de tous genres a amené Bernard Beugnot à suggérer spirituellement un moratorium qui accorderait un repos bien mérité à l’ombre de la romancière. Pourtant l’ampleur du panorama critique n’a pas découragé de nouveaux efforts: Patrick Henry, inspiré par une admiration durable, vient de réunir des articles réprésentant des approches diverses sur le roman et sa protagoniste, considérés comme un exemplum.

Le sujet de notre journée nous fournit l’utile occasion de replacer Mme de Lafayette et son chef-d’œuvre dans le cadre de la société et du milieu littéraire de son temps, de voir comment en fonctionnent les codes et les mentalités.

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