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La Re-Naissance de Vénus : une oeuvre des débuts de Boucher retrouvée à Paris

Alastair Laing

Alastair Laing, "La Re-Naissance de Vénus : une oeuvre des débuts de Boucher retrouvée à Paris", dans Revue de l’Art, année 1994, volume 103, numéro 103, p. 77-81.

Extrait de l’article

La « Glasnost » a déjà eu des conséquences inopinées, mais bien peu d’aussi bon augure que la redécouverte, à l’ambassade de Roumanie ; à Paris, d’une œuvre majeure des débuts de Boucher. Le nouvel esprit d’ouverture à l’Ouest de ce pays na­guère contenu derrière le rideau de fer a rendu son ambassade plus ac­cessible. Et c’est ainsi que La naissance de Vénus de Boucher, dont on ignorait le sort exact depuis qu’en 1925 Maurice Fenaille en attestait la présence dans la collection de la comtesse de Béhague, a reparu dans le cercle des initiés.

L’importance toute particulière de ce tableau dans l’œuvre de Boucher tient au fait qu’il est désormais — et ce grâce aux recherches d’archives ef­fectuées par Georges Brunel — pos­sible de le reconnaître pour celui qui manquait jusqu’alors « du nombre de grands tableaux qu’il avoit fait pour un sculpteur marbrier nommé Dorbay, qui en avoit garni toute sa mai­son, ce qui lui avoit été très-facile, car Boucher, ne cherchant alors qu’à se faire connoître, les auroit, je crois, faits pour rien, plus tost que d’en laisser manquer l’occasion ».

Or ces grands tableaux sont l’élé­ment déterminant de la carrière de Boucher : véritable manifeste procla­mant son retour sur la scène parisienne en 1731, un nouveau départ après l’échec subi lorsqu’il s’était vu refuser le voyage en Italie qui ré­compensait généralement le Prix de Rome (et qu’il avait dû accomplir à ses frais quelques années après avoir gagné le Prix), ils incarnaient en même temps une manière nouvelle chez le peintre, des traits de pinceau vigoureux et ostensibles convenant à une plus vaste échelle, et une palette généralement atténuée, conférant toute leur force aux touches plus co­lorées, le plus souvent rouges ou d’un bleu assez spécial (dont il a pu em­prunter le particularisme à Castiglione).

D’autre part, ces compositions plus ambitieuses supposaient l’élaboration d’esquisses d’ensemble aux crayons et à l’huile, et, pour les per­sonnages, de dessins préparatoires. Il semble qu’à cette occasion, et à la suite du succès remporté par la publication des Figures de différents caractères, gravures d’après les dessins de Watteau (1726-1728) dont il avait lui-même gravé cent dix-neuf des trois cent-cinquante planches, Boucher se soit rendu compte que ces esquisses et dessins pouvaient se transformer en marchandises négociables, l’abondance des dessins qui se rattachent à La naissance de Vénus n’est d’ailleurs pas le moindre intérêt du tableau.

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