Les rides d’Apollon : l’évolution des portraits de Louis XIV
Stanis Perez
Perez, Stanis, "Les rides d’Apollon : l’évolution des portraits de Louis XIV", dans Revue d’histoire moderne et contemporaine, n° 50-3, 2003/3, p. 62-95.
Extrait de l’article
L’anecdote est rapportée par l’abbé Mazière de Monville. Alors que le roi scrute le portrait que Mignard vient de faire de lui, le monarque fait cette réflexion : « Vous me trouvez vieilli, disoit ce prince à son Premier peintre, qui le regardoit avec un extrême attention. “Il est vrai, Sire, que je vois quelques campagnes de plus tracées sur le front de Votre Majesté”. On peut juger par la réponse de Mignard, que les rides du front n’avoient point passé jusqu’à l’esprit ». Vrai, faux ou transformé, ce bref échange entre le peintre et son modèle pose bon nombre de questions touchant à la représentation du roi. Non que le sujet soit des plus neufs : de nombreuses analyses, souvent de qualité, ont traqué les mécanismes de la représentation de la monarchie jusqu’à ses recoins métalliques. Mais le dispositif mytho-historique de la représentation (le roi est Apollon, Mars, Hercule, le roi est toujours vainqueur sur les champs de bataille) ne saurait totalement éluder le problème de l’évolution des portraits en relation simplement avec la vie biologique du roi, celle-là même qu’il s’agit avant tout de représenter.