La sculpture en ivoire au début du XIIIe siècle, d’un monde à l’autre
Dany Sandron
Dany Sandron, "La sculpture en ivoire au début du XIIIe siècle, d’un monde à l’autre", dans Revue de l’Art, année 1993, volume 102, numéro 1, p. 48-59.
Extrait de l’article
Dans l’histoire de la sculpture gothique, les ivoires tiennent une place de choix. A partir du milieu du XIIIe siècle se multiplient les chefs-d’œuvre dans un matériau goûté par les meilleurs artistes de l’époque. Les grandes statuettes de Vierges à l’Enfant, celles provenant des trésors de la Sainte-Chapelle ou de Saint-Denis, les célèbres groupes du Louvre, la Descente de croix ou le couronnement de la Vierge pour ne citer qu’eux, témoignent avec éloquence d’un art parvenu à sa pleine maturité.
Œuvres parisiennes fécondées par la vitalité des chantiers de sculpture monumentale, elles égalent en qualité les apôtres de la Sainte-Chapelle ou les sculptures du transept de Notre-Dame. Il est d’ailleurs plus que probable que les mêmes artistes aient alors travaillé indifféremment des matériaux comme la pierre, l’ivoire ou le bois, ce qui expliquerait en partie l’absence de témoignages documentés précis sur l’ivoirerie parisienne avant le XIVe siècle.
On conserve un certain nombre de pièces précédant la pleine floraison de l’ivoirerie parisienne. Parmi elles, cinq, regroupées récemment, ont été attribuées au nord de la France et datées des environs de 1240. Qu’en est-il de la période immédiatement antérieure ? On a longtemps soutenu qu’il y avait eu sinon un arrêt, au moins une transition difficile à reconstituer dans la production de sculpture sur ivoire au début du XIIIe siècle, entre les derniers reliefs romans et ces statuettes en ronde-bosse.