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Les historiens et le mythe de Versailles en Europe, des années 1960 à nos jours

Flavie Leroux

Leroux Flavie, « Les historiens et le mythe de Versailles en Europe, des années 1960 à nos jours », Bulletin du Centre de recherche du château de Versailles, Articles et études.

Extrait de l’article

Les contemporains qui l’ont fréquenté sous l’Ancien Régime, les visiteurs qui l’ont découvert au xixe siècle et les historiens qui s’en sont emparés depuis ont tous, à leur manière, participé à l’édification d’un Versailles métahistorique, voire mythique. Le programme de recherche « Identités curiales et le mythe de Versailles en Europe : perceptions, adhésions et rejets (XVIIIe-XIXe siècles) » mené par le Centre de recherche du château de Versailles (CRCV) depuis 2017 vise à étudier la construction, les évolutions et les effets de ce mythe tel qu’il a pu être vécu et élaboré par les acteurs historique. L’objectif de cet article est de contribuer à la réflexion, mais en se focalisant plutôt sur le Versailles des historiens, étudié dans ses rapports avec les autres cours d’Europe : dans quelle mesure l’historiographie s’est-elle appuyée sur une idée fantasmée de Versailles et a-t-elle contribué à l’entretenir ? Comment tente-t-elle de sortir de cet écueil ?

Dès 1777, l’écrivain Louis-Antoine Caraccioli formule l’idée d’une « Europe française », sous-titre de son ouvrage Paris, le modèle des nations étrangères. Antoine de Rivarol relaie cette vision en tentant d’en démontrer la pertinence au niveau linguistique, dans De l’universalité de la langue française (1784). La question de « l’influence française » est dès lors au cœur de nombreux travaux, couvrant des disciplines variées et émanant pour la plupart d’auteurs français. Cette tendance nationaliste prend son véritable essor après la Révolution, sous la monarchie de Juillet et plus encore dans la première moitié du xxe siècle, au moment où émergent de nouveaux États particulièrement puissants (comme l’Empire allemand) et où pullulent les mouvements indépendantistes. Des linguistes comme Ferdinand Brunot, des littéraires comme Louis Reynaud ou encore des polygraphes comme Lefebvre Saint-Ogan considèrent la France comme « l’initiatrice par excellence de l’évolution » et Versailles comme l’une de ses plus brillantes manifestations, en particulier sur les plans artistique et culturel.

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