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Ecritures liminaires. Les livres dont le prince est un enfant 

Dinah Ribard

Dinah Ribard, « Ecritures liminaires. Les livres dont le prince est un enfant », Les Dossiers du Grihl, 15-3, 2022

Extrait de l’article

Je voudrais regarder ici comment le pouvoir politique peut s’écrire, à l’époque moderne, dans des livres qui ne parlent pas de lui. En choisissant le verbe écrire pour formuler ce projet, je l’ai préféré à inscrire, qui renverrait à la censure et aux marques qu’elle laisse dans les livres dont elle n’a pas empêché la publication : je l’ai choisi pour réfléchir à d’autres formes possibles d’exercice du pouvoir sur le livre, et par le livre. Des actes d’écriture existent qui font venir le pouvoir dans des livres dont il n’est pas le sujet, parce que ce ne sont ni des ouvrages de théorie politique, ni des portraits du roi : des actes d’écriture qui l’interprètent, le manipulent, le mettent en œuvre. Deux articles de Christian Jouhaud, dont l’un en collaboration avec Hélène Merlin, ont montré ce qu’une épître dédicatoire pouvait montrer du pouvoir, et offrir à ses détenteurs. Je vais me concentrer ici sur des cas où, pour des raisons de circonstance, dédier un livre a comme imposé, plutôt que permis, de penser le pouvoir politique ; de le penser individuellement, pour soi-même, dans l’acte même d’écrire qu’on dédie. Je ne parlerai pas d’ouvrages importants ni d’épîtres dédicatoires remarquées, mais de gestes fugaces, ou passés inaperçus, de cas marginaux, et qui pour cela même rendent bien visible comment le pouvoir trouve à exister dans les livres.
Dans un petit ensemble constitué d’ouvrages dédiés au roi pendant les périodes de régence des deux derniers siècles de l’Ancien Régime, j’ai choisi deux cas autour desquels organiser cette réflexion, sans suivre l’ordre chronologique : d’une part un objet apparemment mince, la dédicace de L’Art de toucher le clavecin de François Couperin (1716), et d’autre part un objet au contraire riche et étrange, mais très peu connu, à savoir l’ensemble d’épîtres dédicatoires qui ouvre La Famille chrétienne sous la conduite de Saint Joseph d’Alexandre Colas de Portmorant (1644). Qu’est-ce que dédier un livre au roi quand le roi est un enfant ?

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