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L’Académie protestante de Saumur et les Néerlandais
Willem Frijhoff
Willem Frijhoff, « L’Académie protestante de Saumur et les Néerlandais », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, 123-4, 2016, 61-91.
Extrait de l’article
L’attrait combiné du vin d’Anjou, de la pureté de la langue française, de la vigueur, puis de la modération théologique ont fait de Saumur une étape incontournable du grand et du petit tour des jeunes Néerlandais pérégrinant au XVIIe siècle. Contrairement à Angers, Bourges et surtout Orléans, où les étudiants venaient soit pour obtenir un grade facile soit, surtout s’ils étaient nobles ou avaient des prétentions aristocratiques, pour parader et se faire valoir dans les Nations Germaniques et autres structures de sociabilité réglée, Saumur était une petite ville où la convivialité était la règle et le protestantisme dominant, ce qui rendait la ville extrêmement populaire parmi les jeunes bourgeois néerlandais désireux d’apprendre l’esprit de la France sans se fatiguer outre mesure, tout en restant dans le droit fil religieux. L’attrait de Saumur était double : la ville se trouvait au cœur de la région réputée la plus agréable du royaume et la plus propice à l’apprentissage d’un français mélodieux, acceptable à la cour ; et contrairement à quasiment toutes les autres villes populaires parmi les jeunes, elle était dotée d’une institution publique d’enseignement supérieur, l’académie protestante, qui était entourée à son tour de maîtres particuliers en toutes sortes de pratiques sociales, de la danse et la musique à l’équitation et au dessin. Pour les jeunes étrangers, l’académie n’était donc qu’un atout de Saumur parmi d’autres, et les malheurs que l’académie connut au cours de son existence n’eurent pas forcément une incidence directe sur la fréquentation de la ville.
Saumur se présentait comme une ville multifonctionnelle. Elle attirait par conséquent plusieurs catégories de jeunes : futurs pasteurs, étudiants, aristocrates au grand tour, touristes authentiques, simples passants. Quelques grands noms de l’histoire hollandaise ont laissé des témoignages de leur passage à Saumur et tout d’abord Pieter de la Court, qui y séjourna en mai et juin 1642. Ce jeune étudiant, fils d’un immigré wallon fabriquant de drap de Leyde, était un intellectuel observateur et brillant ; il songea alors à se faire ministre mais finit sa vie comme un auteur politique influent d’esprit républicain, tenant du libéralisme économique.
