Du commerce à la cour. Les marchands parisiens et la cour de Bourgogne, 1363-1422
Florence Berland
Berland, Florence, "Du commerce à la cour. Les marchands parisiens et la cour de Bourgogne, 1363-1422", Hypothèses, 1, 2009 (12), p. 27-37
Extrait de l’article
En septembre 1402, le duc de Bourgogne Philippe le Hardi gratifie « Fransoys de Passan et Jehan Sac, marchans gennevois demourant a Paris » d’un don de mille écus d’or « pour leur aidier a achater une maison en la ville de Paris ». Ce don peut sembler de prime abord quelque peu surprenant : pourquoi en effet aider des Parisiens, certes d’origine italienne, mais solidement implantés à Paris et qui plus est de riches marchands, à investir dans l’immobilier de leur ville d’adoption ? Il témoigne de la complexité du lien qui unit les premiers ducs Valois de Bourgogne au milieu des marchands et fournisseurs parisiens.
Le duc de Bourgogne séjourne souvent et longtemps à Paris, accompagné de son hôtel et de ses courtisans. Paris est la ville capitale du royaume, où il est primordial d’avoir un ancrage : elle est à la fois centre de production de luxe où le prince et sa cour peuvent se fournir, et centre et enjeu de pouvoir, théâtre de la concurrence des princes dans un contexte qui se tend au cours de la période considérée. Parmi tous les Parisiens avec lesquels le duc peut nouer des liens, les marchands et les fournisseurs constituent un groupe important, et essentiel à la vie de la cour. La cour est en effet un centre de consommation, qu’il s’agit d’approvisionner, et le poids de Paris dans la consommation ducale est renforcé par les habitudes parisiennes du duc, qui, même lorsqu’il est loin de Paris, dépêche des chevaucheurs pour y acheter ou en ramener des vêtements, tapisseries ou pièces d’orfèvrerie. Paris tient le premier rang en valeur des achats effectués : pour l’orfèvrerie et le textile, de 1363 à 1422, de 60 à 95% des sommes dépensées par les ducs le sont à Paris. Les marchands parisiens ont aussi un rôle financier considérable, et sont souvent sollicités pour alimenter les caisses du duc.