De la commission à l’office de la Couronne : les Gardes des sceaux de France du XVIe au XVIIIe siècle
Bernard Barbiche
Bernard Barbiche, "De la commission à l’office de la Couronne : les Gardes des sceaux de France du XVIe au XVIIIe siècle." dans Bibliothèque de l’École des chartes, année 1993, volume 151, numéro 2 p. 359 - 390.
Extrait de l’article
Dans l’appareil gouvernemental tel qu’il s’est progressivement mis en place tout au long des trois siècles de l’époque moderne, le chancelier de France occupait une place à part.
Détenteur des sceaux royaux (grand sceau de majesté et sceau dauphin), chef de la justice et de toute la hiérarchie des officiers, chef né des Conseils du roi, chargé en outre à partir de 1566 de la censure et du contrôle de la librairie, ce grand officier de la couronne était le seul ministre inamovible. Le roi pouvait mettre fin à son gré aux fonctions du surintendant puis du contrôleur général des finances, dont le statut de commissaire était essentiellement précaire, et exiger la démission de ses secrétaires d’Etat, qui pourtant étaient des officiers ; mais il ne pouvait révoquer son chancelier, sauf en cas de forfaiture.
Quand, pour des raisons diverses (état de santé, sénilité, disgrâce...), ce dernier ne pouvait plus exercer sa charge, le monarque le remplaçait par un suppléant appelé « garde des sceaux ». Ce personnage remplissait alors tout ou partie des attributions habituellement dévolues au chancelier, à commencer par la conservation matérielle du coffret des sceaux et par la présidence de l’« audience du sceau », séance solennelle périodique dans laquelle étaient scellées les lettres patentes, celles tout au moins qui par leur nature étaient soumises à cette formalité, c’est-à-dire les lois, les provisions d’offices et les autres mesures de portée générale ou particulière qui mettaient en jeu l’exercice de la souveraineté.