Clovis dans les miroirs dominicains du milieu du XIIIe à la fin du XIVe siècle
Colette Beaune
Colette Beaune, "Clovis dans les miroirs dominicains du milieu du XIIIe à la fin du XIVe siècle", dans Bibliothèque de l’Ecole des chartes, année 1996, volume 154, numéro 154-1, p. 113-129.
Extrait de l’article
Plusieurs miroirs dominicains ont été écrits dans le royaume de France entre le milieu du XIIIe siècle et le début du règne personnel de Charles VI : deux par Vincent de Beauvais ; un par Guillaume Peyraut ; un par saint Thomas, inachevé ; un autre, anonyme, au début du XIVe siècle ; celui de Robert Gervais vers 1385. Dans le même temps, les franciscains n’en ont rédigé que deux, les cisterciens un et les augustins un. L’œuvre de Gervais est la seule à porter le titre explicite de « Miroir », mais les autres sont aussi des manuels destinés au roi ou à son entourage, visant l’éducation princière ou exposant les voies du bon gouvernement : en bref, ce que, depuis Wilhelm Berges, les historiens ont coutume d’appeler des « miroirs ». Cette propension des dominicains à composer ce genre d’ouvrage, qui avait été plutôt, au XIIe siècle, l’apanage des cisterciens, s’explique par le quasi monopole qu’ils ont détenu, entre 1248 et 1388, de la fonction de confesseurs royaux. Par ailleurs, ces universitaires cultivés avaient les bibliothèques nécessaires à l’élaboration de tels ouvrages, en particulier au couvent Saint-Jacques de Paris ; ils purent en outre, au XIVe siècle, utiliser celle du roi et celle du pape d’Avignon. L’étude du personnage de Clovis dans ces miroirs permet à la fois de mesurer les connaissances que les dominicains pouvaient avoir sur le règne du premier Mérovingien, et de cerner le rôle exemplaire tenu par celui-ci dans une tradition historique qui n’avait pas les mêmes objectifs que celle de Saint-Denis.