Iconoclasme et iconophobie : quatre études de cas historiques
Madeline H. Caviness
Madeline H. Caviness, "Iconoclasme et iconophobie : quatre études de cas historiques", dans Diogène, n° 199, année 2002/3, p. 119-134.
Extrait de l’article
L’iconophobie – littéralement la « peur des images » – survient d’habitude de façon proportionnelle aux pouvoirs qu’attribuent aux images ceux qui les vénèrent aussi bien que ceux qui les pourfendent. Dans le pire des cas, ces peurs ont conduit, ou au moins ont coïncidé avec un cycle de violence pouvant impliquer la destruction réelle de certaines images (iconoclasme), accompagnée d’une destruction réelle de vies humaines. La distinction entre les deux activités est souvent confondue par notre propre langage : par exemple, nettoyer les espaces publics en enlevant les statues gigantesques des dirigeants soviétiques au début des années 1990 rappelle les nettoyages opérés par Staline sur des peuples entiers au cours de la génération précédente (fig. 1). (...)
Troisième étude de cas : Pendant la Révolution française, l’enlèvement des immenses statues royales des squares de Paris constituait un cas d’iconoclasme car ici aussi le monarque « sacré » avait le pouvoir d’accomplir des miracles (...)
Une autre forme d’iconoclasme révolutionnaire prenait la voie de la diffamation. L’accusation habituelle d’homosexualité a été utilisée contre la reine (traitée ainsi à la fois d’adultère et d’idolâtre). Circulant sous forme de reproduction, l’image pornographique privait Marie-Antoinette de toute dimension royale, dans un contraste marqué avec les portraits officiels de la cour ; une telle bassesse physique ne pouvait incarner le royaume (fig. 8). (...)
Quatrième étude de cas : En réalité, les têtes de ces statues ont reçu un enterrement rituel dans la cour d’un hôtel particulier, loin de la Cathédrale, soigneusement empilées et regardant toutes dans la même direction – à l’instar de ce que l’on peut voir à présent au Musée National du Moyen Âge et des Thermes de Cluny (fig. 11 et 12).