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« Contre-révolution », « guerre civile », « lutte entre deux classes» : Montlosier (1755-1838) penseur du conflit politique moderne

Marie-France Piguet

Marie-France Piguet, "« Contre-révolution », « guerre civile », « lutte entre deux classes» : Montlosier (1755-1838) penseur du conflit politique moderne", dans Astérion, année 2009, numéro 6.

Extrait de l’article

Resté célèbre pour sa lutte contre l’influence politique des Jésuites et du courant ultramontain, suite à la publication en 1826 de son Mémoire à consulter, le comte de Montlosier s’est fait connaître au début du XIXe siècle en renouant avec les problématiques du XVIIIe siècle qui ont traité de l’histoire de la monarchie et en les renouvelant. Il a fourni ainsi des arguments historiques aux polémiques politiques de la Restauration et exprimé très tôt dans le siècle qu’un conflit interne à une nation pouvait être à la source de transformations et de bouleversements politiques durant les « temps modernes ». Dans ce contexte, il a joué un rôle pionnier dans l’émergence de la notion de lutte de classes, donnant même dès 1821 une des premières attestations connues de l’expression sous une forme non encore lexicalisée, « une lutte entre deux classes ».

Pendant la Révolution, il a siégé à l’Assemblée constituante comme député de la noblesse d’Auvergne, avant d’émigrer à la fin de son mandat en septembre 1791, et d’entretenir avec l’émigration des relations très conflictuelles, comme en témoignent ses Souvenirs d’un émigré. Il a traité de la guerre civile pour en déplorer l’absence au cours de la période révolutionnaire, et soutenu cette position originale à plusieurs reprises, principalement dans des brochures de circonstance, puis plus ponctuellement dans ses ouvrages postérieurs.

Cette étude cherche à explorer les relations entre « guerre civile » et « lutte entre les classes » chez celui dont on a pu écrire que « les rapports sociaux qu’il aperçoit le plus vite et le mieux, ce sont les rapports d’hostilité ». Elle esquisse d’abord la conception de la guerre civile telle que l’on peut la dégager des textes où il en traite explicitement, et établit ensuite ce qu’il entend précisément par « une lutte entre deux classes ». Ces notions sont développées en effet par des textes rédigés à des époques différentes et opèrent dans des contextes spécifiques. Pour l’essentiel, l’étude s’appuie sur trois brochures publiées durant la décennie révolutionnaire, les trois premiers tomes de la Monarchie française (1814) et le tome 6 (1821). Elle a recours, en miroir si l’on peut dire, aux Mémoires de Montlosier et à ses Souvenirs d’un émigré.

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