De l’usage du droit privé et du droit public au Moyen Âge
Gérard Giordanengo
Gérard Giordanengo, «De l’usage du droit privé et du droit public au Moyen Âge», Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes, n° 7 (2000)
Extrait de l’article
S’il me fallait rédiger des « enseignements à un jeune médiéviste » désireux de faire de l’histoire politique, je lui conseillerais d’abord de rejeter la distinction entre souverain et suzerain, d’éviter d’employer le mot procédure inquisitoire, surtout lorsqu’il croira pouvoir l’opposer à l’accusatoire, de bannir les expressions féodalité, société féodale, époque féodale, monarchie ou état féodal, en se limitant à parler de droit féodal. J’ajouterais pour terminer qu’il lui faut se garder absolument de l’anachronisme trop répandu qui est de traiter des réalités du pouvoir médiéval en opposant le droit public au droit privé.
C’est sur ce dernier point seulement que je voudrais m’étendre un peu, non sans ignorer que d’excellents historiens, dont je citerai abondamment les remarquables travaux, n’ont pas hésité à appliquer cette division binaire à l’État du Moyen Âge et que les résultats de leurs enquêtes n’ont pas été mis en question.
Il est facile d’arguer que cette division du droit se rencontre en tête des Institutes et du Digeste de Justinien (533), qu’elle a été connue et commentée dès le début du XIIe siècle par les civilistes de Bologne et d’ailleurs, que la science politique du XVIIe siècle l’a remise en honneur et qu’elle a été consacrée par la suite par l’enseignement, les spécialistes et les faits, malgré les doutes de quelques historiens ou philosophes du droit contemporains (...)