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L’héroïsme à l’épreuve de l’absolutisme. L’exemple du maréchal de Gassion (1609-1647)

Hervé Drevillon

Drevillon, Hervé, L’héroïsme à l’épreuve de l’absolutisme. L’exemple du maréchal de Gassion (1609-1647), Politix, vol. 15, n° 58, Deuxième trimestre 2002. Guerres et paix, sous la direction de Annie Collovald et Pierre Lascoumes, p. 15-38

Extrait de l’article

Contrairement à Cyrano de Bergerac, Jean de Gassion fut un authentique cadet de Gascogne. Troisième fils d’une famille parlementaire de Béarn, il a effectué le parcours exemplaire des « soldats de fortune » en débutant, en 1625, comme simple gendarme pour mourir maréchal, en 1647. Célébré comme un parangon des vertus héroïques, il était courageux jusqu’à la témérité, sourcilleux sur le point d’honneur, fidèle dans ses amitiés. Nous l’avons dit, c’était un authentique cadet de Gascogne... Pour le lecteur familier des romans de cape et d’épée, le portrait de ce héros se dessine avec l’évidence des lieux communs. Mais, à l’époque où le véritable d’Artagnan cherchait misérablement à se vendre à Mazarin, la gasconitude n’était pas nécessairement de bon ton. Trop de méridionaux des rives de l’Adour avaient poussé le zèle de la foi calviniste jusqu’à se révolter contre le roi. Gassion était de ceux-là. D’autres encore sacrifiaient à la mode sacrilège du point d’honneur en se battant en duel à tout propos. Gassion était de ceux-là. D’autres, souvent les mêmes, entretenaient le culte de la bravoure par des actions d’éclat, à une époque où la discipline et la soumission à l’ordre monarchique étaient censées contribuer à la destruction des valeurs primitives de la noblesse guerrière. Gassion, qui était aussi de ceux-là, n’en est pas moins devenu maréchal de France à l’âge de trente quatre ans.

Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, il n’a pas accédé au statut de héros malgré ces apparentes incongruités, mais grâce à elles. Pour soutenir l’immense effort de guerre qu’ils exigeaient de leurs sujets, Louis XIII et Louis XIV ont dû faire appel à toutes les contributions. Les uns ont payé cet impôt de leurs deniers, les autres de leur sang. Il a fallu rendre intelligible à chacun le culte du service et du sacrifice. Jean de Gassion, calviniste et gascon, offrait un modèle à tous ceux qui par conviction religieuse ou par « devoir de révolte » s’étaient insurgés contre l’ordre monarchique, lors des guerres de religion ou des prises d’armes de la noblesse « malcontente ». Il fallait de tout pour faire l’armée du roi, y compris de ceux qui croyaient ou se comportaient mal, mais qui se battaient bien. Avec ses nécessités, la guerre imposait sa loi, dont Gassion fut la personnification.

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