Ce que nommer veut dire. Les titres et charges de cour dans la Toscane des Médicis (1540-1650)
Hélène Chauvineau
CHAUVINEAU H., Ce que nommer veut dire. Les titres et charges de cour dans la Toscane des Médicis (1540-1650), Revue historique 2002/1, N° 621, p. 31-49.
Extrait de l’article
La cour de Toscane est une création tardive. Certes, Côme l’Ancien
et Laurent le Magnifique se sont entourés au XVIe siècle d’un
cercle artistique que certains historiens n’ont pas hésité à qualifier
de « cour ». Mais l’institution aulique en soi, composée d’un lieu,
de liens et d’un statut courtisans n’apparaît véritablement que lors
de la restauration des Médicis : la cour immortalisée par Musset
dans Lorenzaccio est attestée à partir de 1535 dans les archives toscanes.
Ce n’est cependant pas Alexandre mais Côme Ier que l’on crédite
de la véritable fondation institutionnelle ; il faut attendre 1540
pour que les registres de paiement des courtisans se succèdent régulièrement,
preuve de la permanence de ce rassemblement autour du
prince. D’ailleurs, l’organisme aulique regroupant 21 personnes à
ses débuts entame dès lors rapidement son expansion numérique : il
atteint 257 membres en 1574, 462 en 1608 puis 575 en 1648.
Or en 1540, la plupart des cours italiennes sont déjà créées depuis
un certain temps. Seuls les Farnese à Parme et les Savoie à Turin
attendent eux aussi le milieu du XVIe siècle pour mettre en place une
société aulique – Venise étant la notable exception à cette tendance
générale à la « curialisation ». De plus, l’Italie participe à un mouvement
européen de grande envergure qui l’a parfois précédée, comme
le rappelle la précocité des cours bourguignonne, française et espagnole
par rapport à celle du palais Pitti. Par conséquent, la cour de
Toscane est créée alors que quelques cercles auliques sont déjà des
modèles éprouvés, des références circulant entre les différents pays ou
États. La normalisation des comportements courtisans est en outre à
l’oeuvre depuis des décennies. Le cercle aulique médicéen est donc
sans doute sous l’influence d’un passé qui n’est pas le sien : celui des
autres cours européennes.