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Histoires, annales, chroniques. Essai sur les genres historiques au Moyen Âge

Bernard Guenée

Guenée, Bernard, "Histoires, annales, chroniques. Essai sur les genres historiques au Moyen Âge", dans Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 28e année, N. 4, 1973. p. 997-1016.

Extrait de l’article

En 1938, A. Pauphilet, publiant des extraits de Robert de Clari, de Villehar- douin, de Joinville, de Froissart et de Commynes, intitulait son livre Historiens et chroniqueurs du Moyen Age. Il n’expliquait pas ce qu’il entendait par ces deux mots, ni s’il y mettait la moindre différence. Ranulf Higden, dans son prologue, marquait sa volonté que son œuvre fût appelée une « histoire polychronique » (historia polychronica). Plusieurs manuscrits respectaient cette volonté, mais d’autres, dès le XVe siècle, intitulaient le livre Polychronicon. Au XVIe siècle, les Réformateurs ne parlaient que du Polychronicon. Ch. Babington, l’éditant en 1865, gardait le titre erroné mais traditionnel. Et depuis lors chacun est sûr que l’œuvre de Ranulf était, aux yeux de son auteur, une chronique, et raisonne en conséquence. En 1858 enfin, Vallet de Viriville, traduisant la chronique latine de Jean Chartier, n’hésitait pas à rendre « Frater Johannes Cherterii... cronographorum omnium cappellanorum minimus... » par « Frère Jean Chartier, le plus petit d’entre les chroniqueurs ou historiographes de ce sérénissime roi ». On pourrait multiplier les exemples. Il est clair qu’aux XIXe et XXe siècles bien des chercheurs n’ont vu dans les œuvres historiques médiévales que des carrières de faits. Indifférents à ce que leurs auteurs pouvaient penser ou voulaient dire, convaincus qu’il était inutile de distinguer des genres historiques, ils acceptaient sans problème les traditions les plus contestables, prenaient les mots les uns pour les autres et distribuaient les titres au hasard.

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