Relire Bernard Palissy
Jean Céard
Jean Céard, "Relire Bernard Palissy", dans Revue de l’Art, année 1987, n° 1, p. 77-83.
Extrait de l’article
« Ami lecteur, puis qu’il a pieu à Dieu que cest escrit soit tombé entre tes mains, je te prie, ne sois si paresseux ou téméraire de te contenter de la lecture du commencement ou partie d’icelui ».
Ces premiers mots de l’avis qui précède la Recepte véritable de Bernard Palissy sont certes un lieu commun de l’époque et il n’est pas rare de voir les écrivains du XVIe siècle adresser à leurs lecteurs de telles exhortations ; on est cependant tenté de penser que Palissy n’avait pas tort de craindre l’indifférence de la postérité quand on constate que nous ne disposons pas d’une bonne réédition moderne de ses œuvres.
En outre, sur l’homme, l’artiste, le savant et l’écrivain, la dernière étude globale de qualité remonte à 1902. L’« inventeur des rustiques figurines du Roy », selon le titre que Palissy n’omettait pas de rappeler, n’a guère laissé que le souvenir, embelli par la légende, de son acharnement à découvrir le secret des émaux, et tout le monde sait quels sacrifices il consentit pour y parvenir. On sait beaucoup moins l’ampleur et la diversité des sujets qui retinrent l’attention du savant, les qualités de l’écrivain et la ferveur du protestant.