Philippe le Bel. Genèse d’une image
Sophia Menache
Menache, Sophia, "Philippe le Bel. Genèse d’une image", dans Revue belge de philologie et d’histoire, 1984, vol. 62, n° 4, p. 689-702.
Extrait du texte
Dans son article sur L’histoire de l’État en France à la fin du Moyen Age, Bernard Guenée a mis en question la conception traditionnelle qui rattache le début des temps modernes au règne de Philippe le Bel : « Mais l’essentiel est de bien ruiner les vieilles murailles qu’ont longtemps été le règne de Philippe le Bel, soi-disant début de la France moderne ... ». En revanche il a souligné la continuité et même la dépendance entre le règne de Philippe le Bel et celui de saint Louis ou même de Philippe Auguste. Mais du point de vue historiographique c’était cette « modernité », imaginaire ou réelle, qui a servi de cause première à l’attirance que le règne de Philippe le Bel a exercé sur les historiens pendant des siècles. Sans doute, le règne de Philippe le Bel s’inscrit-il dans un long processus dans lequel la maison royale sert d’axe central dans la consolidation du système politique. Ce processus se fait jour sur un certain nombre de plans ; d’une part les progrès de l’administration royale qui cherche à s’insinuer dans tous les aspects de la vie quotidienne ; d’autre part, la lutte sans merci contre les forces hostiles à la monarchie centralisatrice, qu’il s’agisse d’éléments décentralisateurs comme les Flamands ou le Souverain Pontife, ce dernier, en la personne énergique de Boniface VIII, refusant effectivement de reconnaître le nouvel état de choses.