Une intellectuelle, auteure et mécène parmi d’autres : Marguerite de Valois (1553-1615)
Eliane Viennot
Éliane VIENNOT, « Une intellectuelle, auteure et mécène parmi d’autres : Marguerite de Valois (1553-1615) », Clio, numéro 13-2001, Intellectuelles.
Extrait de l’article
Bien qu’Alexandre Dumas l’ait représentée en train de donner des leçons (particulières) de grec au beau La Mole, Marguerite de Valois n’est plus connue pour être une intellectuelle. C’est l’une des évidences que le mythe de la Reine Margot a été chargé de recouvrir, avec un succès qu’on ne mesure pas puisque la réalité a disparu derrière lui.
Sa vie montre en effet que, née dans un groupe social où les femmes étaient des mécènes, et à une époque où des femmes très diverses avaient décidé d’investir la scène littéraire, elle a utilisé sa notoriété, ses moyens et sa très grande culture pour promouvoir des idées, aussi bien sur le plan politique que philosophique et littéraire, aussi bien par l’encouragement à la création que par l’écriture de plusieurs œuvres et la publication de certaines. L’entreprise de distorsion et d’effacement de cette mémoire était sans doute d’autant plus nécessaire que, comme bien des femmes de son époque moins en vue qu’elle-même, elle avait œuvré pour un monde mixte, dans un temps où la plupart des intellectuels travaillaient à organiser et à approfondir la partition des sexes.