Pierre Tristan, chambellan de Philippe-Auguste, et sa famille
Henri Stein
Henri Stein, "Pierre Tristan, chambellan de Philippe-Auguste, et sa famille", dans Bibliothèque de l’École des chartes, année 1917, volume 78, numéro 1, p. 135 - 153.
Extrait de l’article
Dans la remarquable notice qu’il a consacrée à l’un des manuscrits peints par Nicolo di Giacomo da Bologna, notre savant confrère M. le comte Paul Durrieu a péremptoirement démontré la vanité des prétentions généalogiques de la famille d’Estaing, pour qui, à l’aide d’un faux titre fabriqué au XVIIIe siècle, l’on revendiqua entre autres une noblesse ancestrale remontant à Déodat d’Estaing, dit Tristan, « duc représentatif du duché de Narbonne et prince de Rouergue ».
La dite charte, octroyée le lendemain même de la bataille de Bouvines, aurait accordé à ce personnage, en récompense des éminents services rendus par lui à la cause française dans cette journée, l’insigne faveur de porter désormais les armoiries royales, fleurs de lys d’or sur fond d’azur.
La supercherie est évidente, mais son auteur avait pris pour base un passage souvent cité de la chronique de Guillaume Le Breton, qui dans son récit, assure que Pierre Tristan, Petrus Tristanides, avait sauvé la vie de Philippe Auguste à Bouvines en aidant le roi, au moment où il allait être tué par un soldat allemand, à remonter à cheval et à échapper au danger. M. le comte Paul Durrieu a montré comment la légende était née au sein de l’histoire et comment elle a été propagée inconsciemment par divers écrivains au profit de la famille d’Estaing. Je voudrais ajouter quelques détails à sa précieuse démonstration et fournir sur la personnalité de ce Pierre Tristan, jusqu’ici mise insuffisamment en lumière, quelques indications permettant de lui assigner sa véritable place parmi les familiers du roi Philippe Auguste.