Une arme venue d’ailleurs. Portrait de l’étranger en empoisonneur
Franck Collard
Collard, Franck, "Une arme venue d’ailleurs. Portrait de l’étranger en empoisonneur", dans Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur public, 30e congrès, Göttingen, 1999, L’étranger au Moyen Âge, p. 95-106.
Extrait du texte
Au commencement d’un article rédigé voici un siècle sur la vision des Anglais par les Français au cours du Moyen Âge, Charles- Victor Langlois écrivait ces propos : « Les grandes masses d’hommes voient les grandes masses d’hommes voisines suivant les règles d’une optique particulière, qui n’embellit pas ; elles ne distinguent point les nuances ; elles simplifient et par une synthèse grossière d’observations incomplètes, elles créent des types collectifs. Ces types, naïvement schématiques, hantent dès qu’ils sont fixés, l’imagination populaire » . C’est celle-ci qui parle par la bouche de Peuple français, quand cette personnification mise en scène par Pierre Gringore, en 1506, dans le Jeu du Prince des sots, s’écrie à l’adresse de son interlocuteur Peuple ytalique : « Chascun a de ton cas notice : / Poison, en lieu de bonne espice, / Tu bailles, offensant la loy » . Parmi les motifs de la xénophobie ordinaire, un thème apparaît donc qui semble avoir peu retenu jusqu’à présent l’attention des médiévistes : il s’agit de l’association de la figure de l’étranger avec celle de l’empoisonneur.