Entre implication et distanciation : pouvoir et écriture dans la correspondance du cardinal Jean Du Bellay
Loris Petris
Petris Loris. "Entre implication et distanciation : pouvoir et écriture dans la correspondance du cardinal Jean Du Bellay", dans Seizième Siècle, n° 6, 2010, p. 165-184.
Extrait de l’article
Et, m’ayant sa Saincteté mys en bien longs raisonnementz, j’ay cherché tous les coings, recoings et cabinetz de ce vieil et renardique cerveau.
Par ces mots écrits depuis Rome à Anne de Montmorency en 1548, le cardinal Jean Du Bellay tente de cerner la personnalité de Paul III. Cet extrait d’une lettre du cardinal, envoyé à Rome en 1547, illustre deux éléments essentiels de sa correspondance politique : d’une part la créativité verbale du prélat gallican, qui forge le quasi-hapax « renardique », recourt à une synecdoque (cerveau pour esprit) et file, bien avant les moralistes du XVIIe siècle, la métaphore spatiale (j’ai cherché tous les coins et recoings…) ; d’autre part la dimension centrale de la prudence, tant de la part du pontife, « vieil et renardique », donc expérimenté et rusé – en un mot prudent – que de la part de Du Bellay qui doit dépasser les apparences sensibles pour sonder un caractère complexe et secret afin d’en cartographier « tous les coings, recoings et cabinetz ». La métaphore est ici chiffrée, ce qui en dit long sur la prudence du cardinal gallican.
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