L’image de Louvois chez ses contemporains et en particulier chez Quarré d’Aligny
Jean Chagniot
Jean Chagniot, "L’image de Louvois chez ses contemporains et en particulier chez Quarré d’Aligny", dans Histoire, économie & société, année 1996, volume 15, numéro 1, p. 13 - 19.
Extrait de l’article
Qu’une légende noire s’attache à la mémoire de Louvois, nul n’en doute aujourd’hui ; André Corvisier a fait justice de nombre de calomnies et de ragots incontrôlables, qui ont abouti à faire de Louvois le mauvais génie de Louis XIV.
Si nous nous en tenons au jugement de ses contemporains, à coup sûr plus fiable que les divagations cumulatives de la postérité, il apparaît que les reproches adressés à Louvois de son temps n’étaient pas exactement les mêmes que ceux des historiens du XIXe siècle. On ne lui faisait pas tellement grief de la révocation de l’édit de Nantes, ni des dragonnades, ni même de la politique des Réunions ; on ne le soupçonnait pas aussi fortement d’avoir trahi dès 1672, d’ailleurs contre toute vraisemblance, pour permettre aux Hollandais de rétablir une situation désespérée.
D’autres critiques se sont exprimées en revanche, qui furent assez souvent formulées dans un développement antithétique. Le secrétaire d’État de la Guerre était loué pour sa compétence professionnelle dans le cadre restreint de son département. Mais ce compliment permettait de condamner ensuite avec plus d’autorité la présomption et même l’aveuglement du ministre, qui l’ont poussé à « embler la besogne d’autrui » et à compromettre quelquefois le roi par des initiatives ou des arbitrages malencontreux. Des éloges ne sont pas inutiles, si l’on veut donner l’apparence de l’objectivité à une condamnation sans appel.