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Sens et fonctions de l’ornement dans l’entrée royale en France au XVIIe siècle

Marie-Claude Canova-Green

Canova-Green, Marie-Claude, « Sens et fonctions de l’ornement dans l’entrée royale en France au XVIIe siècle », Arti dello Spettacolo / Performing Arts, Performance and Spectacle in Early Modern Europe, 2020.

Extrait de l’article

Dans la langue courante au XVII siècle, ‘ornement’ est synonyme de parure, d’embellissement. Furetière le définit comme “ce qui pare quelque chose, ce qui la rend plus belle, plus agreable” (Furetière 1690 : n. p.). On orne ainsi par amour pour le beau, par souci esthétique de l’apparence, dans le but de satisfaire et de réjouir l’œil par un travail sur la surface extérieure. Dans cette recherche de l’enrichissement et de l’éclat, l’idée de quelque chose de rajouté et donc de détachable, et par conséquent d’accessoire, voire de superflu, domine. Or, si l’on s’en tient à l’étymologie, le premier sens du verbe latin ornare, d’où sont tirés en français le verbe ‘orner’ et son substantif ‘ornement’, est “équiper, outiller, préparer”, en d’autres termes “munir de tout le nécessaire” (Gaffiot 1934 : 1093). Le sens d’“embellir”, de “rehausser” n’est qu’un sens second, qui d’ailleurs n’exclut pas le premier. L’espace urbain en fête des entrées royales du premier XVIIe siècle français est un bon exemple de ces emplois contradictoires du mot et de la chose. En effet, à lire les relations de ces entrées, l’ornement au sens le plus large, car tout est ornement dans l’entrée solennelle, du décor urbain des architectures éphémères au plus petit feston décorant arcs et pyramides, est un ajout qui transforme et embellit les lieux de la ville, quelque chose d’adventice et de luxueux qui vient se superposer à des structures physiquement ou du moins conceptuellement complètes, et partant d’inessentiel à leur fonctionnalité. Toutefois, parce qu’il ne saurait y avoir d’entrée solennelle sans ‘ornements’ de l’entrée, sans ces “ornemens de la Gloire” habituels aux triomphes (Machaud 1629 : 2), l’ornement est aussi, paradoxalement, ce qui permet le bon fonctionnement de l’entrée et qui en marque à la fois la complétude et la perfection1. Dans la mesure où il reste un ajout, un fait second, à première vue accessoire, l’ornement est certes un accident, mais c’est un accident nécessaire, parce qu’il est autant un schème interprétatif que le cadre à l’intérieur duquel se révèle le sens.

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