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Symbolique médiévale et moderne. Le cygne, le coq et le basilic. Introduction à la symbolique médiévale des oiseaux (suite)

Michel Pastoureau

Michel Pastoureau, "Symbolique médiévale et moderne. Le cygne, le coq et le basilic. Introduction à la symbolique médiévale des oiseaux (suite)", dans Annuaire de l’École pratique des hautes études (EPHE), Section des sciences historiques et philologiques, année 2008, numéro 139, p. 204-205, mis en ligne le 25 novembre 2008.

Extrait de l’article

Les conférences de l’année dernière avaient essentiellement porté sur la symbolique générale des oiseaux et sur le problème des rapports entre pratiques d’observation et savoir ornithologique. Le Moyen Âge occidental en effet est curieux des oiseaux, les observe en toutes occasions et les connaît fort bien, beaucoup mieux que les poissons par exemple. Les conférences de cette année ont été plus monographiques et ont principalement étudié deux oiseaux dont la symbolique est particulièrement riche : le cygne et le corbeau.

Oiseau blanc, le cygne est absent de la Bible mais joue un rôle important dans la mythologie gréco-romaine et dans les mythologies de l’Europe du Nord et du Nord-Ouest. Le Moyen Âge chrétien reçoit à son sujet un héritage symbolique multiforme qu’il fait fructifier sur plusieurs terrains : celui de la blancheur et de la pureté ; celui du chant et de la mort ; celui de la métamorphose, surtout. Être changé en cygne est fréquent dans les légendes germano-scandinaves et dans tout un ensemble de traditions lotharingiennes. À ces dernières, se rattache l’histoire du chevalier au cygne, présente dans les chroniques dès la fin du XIe siècle et dans de nombreux textes littéraires quelques décennies plus tard. Elle réunit à elle seule les différents aspects de la symbolique de l’oiseau. En jouant sur les mots, les traditions de l’époque féodale font de ce mystérieux chevalier au cygne (miles cygni) le grand-père de Godefroi de Bouillon, héros de la première croisade (miles signi crucis), et inscrivent sa légende dans le patrimoine mythologique de la Maison de Boulogne, l’une des plus puissantes d’Occident. Les traditions ultérieures opèrent une greffe sur la légende arthurienne et font de ce personnage un ancêtre de Perceval. À la fin du Moyen Âge, nombreux sont les princes et les chevaliers qui « jouent » au chevalier au cygne et qui adoptent un emblème ou une devise au cygne (ainsi Jean de Berry). L’oiseau, parfois déprécié par la symboliques des bestiaires – cachant une chair noire sous un plumage blanc il est une image de l’hypocrisie – s’en trouve valorisé. D’oiseau simplement noble, il devient oiseau pleinement royal. Au point qu’à l’aube des temps modernes, en Angleterre et dans plusieurs pays d’Europe, il est interdit à quiconque n’est pas de sang royal de posséder des cygnes.

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