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Le corps éloquent du roi Henri III et l’école pathétique du théâtre tragique de Robert Garnier 

Claude La Charité

Claude La Charité, « Le corps éloquent du roi Henri III et l’école pathétique du théâtre tragique de Robert Garnier », Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 32, 2016, 49-64.

Extrait de l’article

Pour l’histoire de la rhétorique à la Renaissance, Henri III offre un cas d’étude très intéressant, dans la mesure où il fut sans doute le plus éloquent des monarques de l’Ancien Régime, le brio oratoire ne l’empêchant pas cependant d’être d’une impuissance politique presque complète en raison du contexte particulier de son règne. e dernier des Valois incarne à merveille un certain idéal humaniste, celui de la toute-puissance de la parole éloquente. L’apparente simplicité des traités de rhétorique écrits à son usage donne faussement à penser que le mystère de l’éloquence pourrait se résumer à un catalogue de procédés de style, ce que Gérard Genette a pu appeler, par un anachronisme flagrant, une « rhétorique restreinte » coupée de sa dimension argumentative et réduite aux « fleurs de rhétorique ». Or, les précepteurs de Henri III en matière rhétorique n’ont de cesse d’entretenir une légitime méfiance par rapport aux lois, préceptes et prescriptions, à commencer par Du Perron, auteur d’un traité à l’usage de Henri III et l’un des plus grands orateurs de son règne, capable de convaincre indifféremment de l’existence et de l’inexistence de Dieu à une époque peu sujette à plaisanter sur la question. Dans ses Perroniana, l’humaniste doute de la possibilité d’enseigner la rhétorique, que l’on ne saurait réduire à une recette que n’aurait ensuite qu’à appliquer l’orateur, sans avoir à exercer son « jugement ». Au reste, Germain Forget se montre toujours soucieux d’associer théorie et exercitatio ou, comme il le dit lui-même, « de reduire le tout en pratique ». À cet égard, le recours de cet auteur au théâtre de Garnier se révèle précieux pour remédier aux limites de la théorie, en ce que de tels exemples suggèrent toujours plus que ce qu’ils servent à illustrer. En outre, le choix de Forget de puiser ses exemples dans un genre précis, le théâtre tragique, et un auteur particulier, Robert Garnier, a une incidence sur la nature sentencieuse et la thématique du sacrifice omniprésentes dans le traité de Forget à l’usage du roi.

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