Les triomphes du corps ou la noblesse dans la paix
Lucien Clare
Lucien Clare, "Les triomphes du corps ou la noblesse dans la paix", dans Histoire, économie & société, année 1984, volume 3, numéro 3-3, p. 339-380.
Extrait de l’article
(...)
Quelle est la part des exercices physiques et des jeux du corps dans les spectacles nouveaux décrits par l’abbé de Pure ? Dans ces spectacles, tout comme d’ailleurs dans les spectacles anciens, l’activité corporelle des participants est généralement requise, même s’il ne s’agit que d’une simple présence sous le masque et l’habit d’emprunt ou d’apparat, et à plus forte raison si leur adresse ou leur force est sollicitée : ils sont toujours mêlés au spectacle, le plus souvent activement, se donnant ainsi à voir tout en tirant eux-mêmes jouissance et plaisir du divertissement collectif dans lequel ils trouvent leur place ou dont ils sont les acteurs.
C’est dire que la présence active du corps — dédoublement mimétique infra-sportif ou bien compétition militaire et mondaine pleinement sportive — est une des composantes essentielles du spectacle public (selon l’expression de CF. Menestrier), qui est aussi parade galante : le rayonnement de la force et de la jeunesse s’inscrit dans le jeu maîtrisé des muscles et se traduit par l’exploit sportif ou l’impassibilité mondaine, c’est-à-dire le bel air. La précision horlogère du défilé, l’adresse dans l’action, le bonheur du corps rayonnant de force et d’adresse, sont des éléments primordiaux des spectacles dont Michel de Pure présente l’idée et dont la racine est le plaisir : « le plaisir est l’objet naturel et primitif des Spectacles » (p. 168).