Notice historique sur l’inventaire des biens meubles de Gabrielle d’Estrées
Ernest de Fréville
Ernest De Fréville, "Notice historique sur l’inventaire des biens meubles de Gabrielle d’Estrées", Bibliothèque de l’Ecole des chartes, année 1842, volume 3, numéro 3, p. 148-171.
Extrait de l’article
Le jeudi saint de l’année 1599, le riche partisan Zamet recevait à sa table Gabrielle d’Estrées. Rien n’avait été épargné pour satisfaire, par les plus délicates recherches, le goût de la duchesse de Beaufort, alors grosse de quatre mois. Un témoin oculaire, qui siégeait parmi les convives, remarque même qu’elle fit grand honneur au somptueux repas du financier. Sortant de, table, elle s’en alla à Ténèbres, au Petit-Saint-Antoine, on bientôt elle se sentit indisposée.
On la ramène chez Zamet, le mal fait des progrès effrayants, et nous y reconnaîtrions bien plutôt les signes caractéristiques de véritables convulsions, que ceux de l’apoplexie dont parlent les narrations contemporaines. A peine revenue de la première attaque, la duchesse voulut absolument être transportée de chez Zamet au cloître Saint-Germain l’Auxerrois, chez sa tante, madame de Sourdis. Elle y expira le surlendemain, défigurée à un point qui donne la plus grande force au soupçon d’empoisonnement. La décomposition rapide que la mort fit subir à ce corps, si plein de jeunesse et de santé l’avant-veille, accrédita un conte merveilleux. « Ses ennemis, dit Mézerai, prirent de là occasion de faire croire au peuple que c’estoit le diable qui l’avoit mise en cet estat : ils disoient qu’elle s’estoit donnée à luy, afin de posséder seule les bonnes graces du roy, et qu’il luy avoit rompu le col. »