Le « Grand Tour » des élites britanniques dans l’Europe des Lumières : La réinvention permanente des traditions
Jean Boutier
Jean Boutier, Le « Grand Tour » des élites britanniques dans l’Europe des Lumières : La réinvention permanente des traditions, dans Marie-Madeleine Martinet et al., Le chemin, la route, la voie. Figures de l’imaginaire occidental à l’époque moderne, Paris, Presses de la Sorbonne, 2005, p. 225-242. Version mise à jour publiée en mai 2006 sur HAL
Compte rendu
S’il est une forme canonique du voyage à l’époque moderne qui articule un programme, un itinéraire, un calendrier, une méthode voire une philosophie du voyage, c’est très certainement le “Grand Tour”, considéré comme à son apogée dans l’Europe des Lumières. Pour de nombreux historiens, le Grand Tour, au terme d’un siècle et demi d’expériences et d’innovations, tendrait plutôt à se routiniser, ses intentions fortement éducatives cèderaient progressivement la place aux plaisirs de la déambulation oisive, au détriment de son utilité, en bref que le voyage d’éducation se ferait « tourisme ». L’étude propose au contraire, à partir de trois voyages conduits dans les années 1730-1740 par le même tuteur, Joseph Spence, futur Regius Professor de poésie à Oxford, de considérer la dynamique du Grand Tour non comme un processus séculaire de simplification et d’appauvrissement mais, à l’opposé, comme un processus de diversification, d’enrichissement des diverses « formules » qui, loin de se succéder les unes aux autres, continueraient d’exister les unes au contact des autres.