Faut-il en rire ? Le médecin Rigord, historien de Philippe Auguste
François-Olivier Touati
François-Olivier Touati, "Faut-il en rire ? Le médecin Rigord, historien de Philippe Auguste", dans Revue historique, n° 626, 2003/2.
Extrait de l’article
Magister Rigordus, natione Gothus, professione physicus, regis Francorum cronographus, beati Dionysii Areopagite clericorum minimus...
Telle est la formule par laquelle le célèbre auteur des Gesta Philippi Augusti se présente d’entrée, dans le prologue dédicatoire au jeune prince Louis, ajouté à son œuvre vraisemblablement vers 1200 : « médecin et chronographe du roi, le plus petit des clercs de saint Denis l’Aréopagite », c’est-à-dire déjà plus que moine...
Peu banale dans ce type d’écrit, pareille suscription de la part d’un médecin, surtout connu pour être l’écrivain d’autre chose que de médecine, appelle l’attention sur l’élaboration d’un témoignage généralement considéré comme majeur sur un règne (1180-1223) lui-même tenu pour décisif. Pièce essentielle d’une nécessaire contextualisation qui semble avoir été quelque peu éludée, elle oriente notre intérêt vers une question simple : quelles interférences existent-elles entre la formation ou la profession médicale et le processus de rédaction littéraire ou historique ? Autrement dit, une spécificité de l’homme ou de l’œuvre, de l’homme et de l’œuvre, peut-elle être reconnue ?