Nobles médecins et médecins de cour au XVIIIe siècle
Guy Chaussinand-Nogaret
Guy Chaussinand-Nogaret, "Nobles médecins et médecins de cour au XVIIIe siècle", dans Annales ESC, année 1977, vol. 32, n° 5, p. 851-857.
Extrait de l’article
La médecine n’a jamais été une profession de prédilection pour le second ordre.
Certes, dans les pays de tradition romaine, Dauphiné ou Comtat, de nombreux médecins
sont nobles et font leurs preuves pour Tordre de Malte. Partout ailleurs ils se recrutent
dans le tiers état et leurs origines sont parfois très modestes. Ils se distinguent en cela
d’autres professions libérales que la noblesse embrassait beaucoup plus volontiers, le bar-
reau par exemple qui constituait une sorte de stage et de position d’attente avant l’exer-
cice d’une charge plus prestigieuse. Mais la médecine a toujours ouvert la carrière des
honneurs à ceux qui se révélaient des maîtres dans leur art. Vingt médecins ont été
anoblis par les ducs de Lorraine du règne de Léopold à la mort de Stanislas (1690-
1766). En France même, les occasions d’une promotion ne manquaient pas : acquisi-
tion d’une charge anoblissante, lettres patentes du roi destinées à récompenser le
« mérite », charges de la cour qui, sans intégrer automatiquement leurs titulaires au
second ordre, les auréolaient du prestige des commensaux du roi. D’ailleurs au XVIIIe siè-
cle l’influence du médecin est en hausse. La tradition antimédicale a certes la vie dure et
ne désarmera pas de sitôt. De Molière à Jules Romains, de Diafoirus à Knock, la source
sarcastique ne s’est jamais tarie. Mais l’opinion à l’égard de la médecine et du médecin
amorce, semble-t-il, un revirement au XVIIIe siècle...