Home / Court life / Sociability and psychologie / Modern studies > Des maux et des hommes : les refuges du (…)

Des maux et des hommes : les refuges du sentiment de l’honneur

Jean-Louis Vergnaud

Vergnaud, Jean-Louis. Des maux et des hommes : les refuges du sentiment de l’honneur, Cahiers Saint-Simon, n° 40, 2012. Les Mémoires de la bibliothèque du duc de Saint-Simon, p. 103-118.

Extrait de l’article

Il y a tout lieu de croire qu’une bonne connaissance du développement des sociétés humaines puisse amener un jour à constater, à chacune des étapes de notre Histoire, un rapport de dépendance entre l’état social et l’idéal que l’individu tient à honneur de réaliser.

C’est ainsi qu’ « au Moyen-âge, écrit Ariette Jouanna, la notion d’honneur était surtout liée à ce qu’on a appelé le code chevaleresque ; elle exprimait un idéal humain d’épanouissement physique et moral, d’aptitude à faire bénéficier autrui de ses propres richesses intérieures, de service de Dieu et du Roi ». Et de fait, si l’on tient que, l’ensemble d’une civilisation se résume dans une de ces expressions synthétiques pleines de sens, parfaitement claires pour ceux qui ont vécu sous l’empire de cette civilisation même, presque inintelligible pour ceux qui veulent plus tard évoquer ces temps passés et en pénétrer les plus intimes secrets, il est évident que la féodalité tient entière dans le mot honneur. Non que ce terme n’existât pas avant cette période ou que le devoir qu’il exprima ne fût ni connu ni pratiqué ; mais ce qu’il laisse entendre dès l’époque moderne, emprunte aux mœurs du Moyen-âge et à ses institutions, sa signification la plus complète et la plus précise. Les raffinements de l’honneur , le point d’honneur — qui expriment alors tout ce qu’il y a d’aigu et de pointilleux dans ce sentiment — dérivent immédiatement, en effet, de ce qu’il est convenu d’appeler le système féodal. La chevalerie fut autant qu’un sacrement , le rêve, l’idéal social de ces hommes dont les conditions de vie, la différenciation des fonctions rendaient nécessaires à chacun de remplir fidèlement sa tache, de jouer un rôle politique et social conformément à l’esprit qu’il s’en était formé. En agissant ainsi, le chevalier ne faisait d’ailleurs que satisfaire ses pairs dont il recherchait par-dessus tout l’estime et la réputation, et dont une étroite discipline le rendait solidaire. Tout montre finalement dans cet honneur des temps féodaux, les exigences d’un état social particulier ; et le code non écrit qui en énonce les maximes, n’est que l’expression des lois et des institutions qui assurent le maintien d’une société qui en exprime la nature.

Lire la suite (persee.fr)