La tyrannie de l’honneur. Les usages du duel dans la France du premier XIXe siècle
François Guillet
Guillet, François, « La tyrannie de l’honneur. Les usages du duel dans la France du premier XIXe siècle », dans Revue historique 4/2006 (n° 640), p. 879-899.
Résumé de l’article
Généralement considéré comme une survivance de l’Ancien Régime, le duel constitue en réalité un des traits caractéristiques de la société française du premier XIXe siècle. Loin de signer sa fin, la Révolution, en refusant de lui donner, comme sous l’Ancien Régime, un statut juridique particulier, met le duel à la portée de tous. Rituel de la haute société, le duel touche aussi une large fraction des classes urbaines, en raison notamment de la mobilisation de millions d’hommes pendant les guerres de la Révolution et de l’Empire, et constitue une pratique caractéristique de la jeunesse masculine, qu’elle contribue à définir. Le duel exprime les tensions sociales et les blocages qui affectent une société française marquée par l’instabilité des positions sociales et traversée par l’angoisse du déclin, et constitue une arme politique utilisée tant dans le cadre du jeu parlementaire que dans les manifestations de rue. Fondé sur une éthique virile, le duel s’insère dans une gamme de gestes et de paroles qui ont pour cadre l’espace public de la rue, du cabaret ou du Parlement et contribue à la définition de la condition masculine.