Chantilly et ses princes : des Lumières à la Révolution
Stéphane Pannekoucke
Pannekoucke, Stéphane. Chantilly et ses princes : des Lumières à la Révolution, Versalia. Revue de la Société des Amis de Versailles, n° 5, 2002, p. 70-85.
Extrait de l’article
Au soir du 14 juillet 1789, l’inquiétude règne dans la maison des princes de Condé, « cousins du Roi » et la prise de la Bastille bouleverse d’ailleurs rapidement et définitivement l’histoire de la famille princière. Déçus par l’attitude du Roi qui n’a pas l’intention de réprimer la révolte comme ils le souhaiteraient, les princes affichent sans nuances leur hostilité à la Révolution en choisissant de quitter la France brusquement, dans la nuit du 16 au 17 juillet 1789.
Pour Louis-Joseph de Bourbon, prince de Condé (1736-1818), et pour son fils, Louis-Henri-Joseph, duc de Bourbon, un exil d’un quart de siècle commence, ponctué de drames familiaux comme l’enlèvement du jeune duc d’Enghien, exécuté ensuite à Vincennes, le 21 mars 1804. Les principaux domaines des princes sont bien vite touchés par les mesures de la Révolution. Par la loi du 8 avril 1792, les biens du prince sont confisqués et l’inventaire en est dressé dès le mois de juin. En 1799, deux entrepreneurs de bâtiments achètent le domaine de Chantilly et démolissent le château et plusieurs constructions du parc pour en récupérer les matériaux. Pendant ce temps, le prince en exil, surnommé par dérision le « Petit Condé » dans les caricatures révolutionnaires, organise la fameuse « Armée de Condé » pour venir en aide au Roi. De retour en France le 3 mai 1814, usé par les événements et les épreuves, le prince de la Restauration est un homme bien différent du prince riche et puissant de l’Ancien Régime. Entre temps, la pyramide des privilèges, avec pour sommet le Roi, s’est effondrée et une nouvelle société est en place que les princes de Condé ne sauront jamais réellement apprivoiser.