Le chantier de Notre-Dame de Dole (Jura) au début du XVIe siècle
Jacky Theurot
Jacky Theurot, "Le chantier de Notre-Dame de Dole (Jura) au début du XVIe siècle", dans Revue de l’Art, année 1995, volume 110, numéro 110, p. 66-73.
Extrait de l’article
Capitale de la Franche-Comté de Bourgogne depuis la fin du XIVe siècle, fortement endommagée après un siège et sa prise par les années de Louis XI, Dole se reconstruisit rapidement dès les années 1490. Demeurée capitale sous les Habsbourg, maîtres de la province, elle se dota d’une forte parure monumentale. Mais incontestablement, le monument majeur, celui qui retient l’œil à des kilomètres à la ronde et s’impose par sa masse architecturale, celui qui se trouve au cœur des œuvres des artistes et des écrivains depuis des siècles, c’est la collégiale Notre-Dame, devenue basilique mineure depuis les années 1950. Cet édifice est un symbole ; « dame souveraine » pour René Tourmer, « phare de libertés comtoises » pour Charles Nodier, sa construction fut l’occasion d’affirmer, au XVIe siècle, la fierté des Dolois et celle d’une ville érigée en véritable bastion de la Réforme catholique.
L’ambition du parti s’affirme d’emblée par l’ampleur des dimensions et par le choix d’une grande nef à trois vaisseaux, dont le vaisseau central est généreusement éclairé par de vastes fenêtres, un transept imposant et un chœur profond de deux travées encadrées de bas-côtés. Conformément à la tradition gothique, l’abside et les chapelles orientées qui l’encadrent comportent des pans coupes dans lesquels s’ouvrent d’immenses baies. Entièrement voûté d’ogives, l’édifice constitue l’un des fleurons de l’architecture flamboyante tardive en Franche-Comté. Loin du foisonnement qui, à la même époque, caractérise nombre de constructions de la France du nord, il révèle une grande recherche de dépouillement formel, qu’il s’agisse des fortes piles circulaires dépourvues de chapiteaux de la nef et du chœur, des larges surfaces murales qui règnent dans les bras du transept et, dans le vaisseau central, entre les grandes arcades et les fenêtres hautes, ou encore du réseau des baies, à l’exubérance maîtrisée. Cette austérité mesurée, ce goût des formes simples et monumentales s’inscrit dans une tradition régionale remontant à l’époque romane et qui s’était diversement manifestée tout au long de l’époque gothique. Seuls les portails échappent à cette tendance, et comme c’est souvent le cas au XVIe siècle, montrent une ouverture vers le répertoire ornemental de la Renaissance. Celui de l’ouest s’ouvre sous une haute tour-porche fortifiée — les échauguettes qui cantonnaient son couronnement sont conservées — et primitivement surmontée d’un dôme octogonal décpité en 1656 par le prince de Condé. Ce que nous entendons évoquer, ici, se sont les conditions dans lesquelles se développa l’idée d’édifier une nouvelle église paroissiale, et comment elle se concrétisa. Pour ce faire nous disposons d’une documentation significative — délibérations municipales et comptes de construction partiels - qui permet de cerner les préliminaires à l’ouverture du chantier et les débuts de celui-ci.