Quand les châteaux étaient peints
Jacques Moulin
Jacques Moulin, « Quand les châteaux étaient peints », Bulletin du Centre de recherche du château de Versailles, Couleurs de l’architecture, février 2002, [En ligne], mis en ligne le 23 septembre 2009.
Extrait de l’article
L’architecture française a la réputation d’avoir toujours privilégié la mise en œuvre de matériaux laissés dans leur état naturel. Ainsi, la pierre ou la brique, comme l’ardoise ou la tuile, semblent avoir gouverné à elles seules la polychromie extérieure des bâtiments anciens, en cantonnant la peinture au rôle mineur de protection des ferrures ou des menuiseries. Il est certain que cette définition correspond à quelques monuments de l’époque classique, et en particulier aux églises construites par Jules Hardouin-Mansart, dont les parements de pierre furent soumis à une réalisation très minutieuse, destinée à mettre en valeur le matériau lui-même. Toutefois, ces exemples relativement rares ne peuvent permettre une généralisation, et une meilleure connaissance des monuments impose de constater que, dès leur construction, de nombreux ouvrages élevés aux xvie, xviie et xviiie siècles firent l’objet de finitions de surface et de peintures parfois fortement colorées, qui leur donnèrent l’aspect réellement souhaité par leurs concepteurs.
Dans cette approche plus nuancée, il faut se souvenir tout d’abord que l’architecture médiévale française était couramment peinte, et que ce décor n’enrichissait pas seulement les façades à pans de bois et les portails des cathédrales. À Provins, le dégagement récent d’une baie d’une des principales maisons du xiiie siècle de la ville, celle du banquier Renier Accorre1, a montré que ses tableaux étaient originellement peints d’un faux appareil jaune à joints rouges et blancs.